Par Benoît Hervieu
Reporters sans frontières
Les inquiétudes exprimées par Reporters sans frontières au moment de la réintégration du Honduras à l’organisation des États américains (OEA) (http://fr.rsf.org/honduras-inquietude-sur-l-avenir-des-07-06-2011,40407.html) restent plus que jamais d’actualité au vu de deux nouvelles affaires de presse politiquement sensibles. Elles concernent deux journalistes de télévision - Mario Castro Rodríguez et Edgardo Antonio Escoto Amador - connus pour leur opposition au coup d’État du 28 juin 2009 et détenteurs d’informations en lien avec celui-ci.
“L’Accord de Carthagène est mort-né et la réconciliation nationale impossible si la censure, la répression et l’assassinat continuent de répondre à la nécessaire information sur le coup d’État et ses conséquences, jusqu’à aujourd’hui. La protection - relative - dont bénéficie Mario Castro Rodríguez, et qui doit être accordée à Edgardo Antonio Escoto Amador, est à la fois nécessaire et insuffisante. Ces affaires doivent susciter des enquêtes approfondies, dussent-elles mettre en cause de hauts responsables de l’armée et de la police, en activité ou à la retraite. L’OEA et la communauté internationale doivent rappeler d’urgence les autorités honduriennes à leur devoir de lutte contre l’impunité. Nous regrettons à cet égard le report de la visite – initialement prévue du 27 septembre au 4 octobre - de Margaret Sekaggya, rapporteur spécial de l’Onu pour la situation des droits de défenseurs des droits de l’homme. Ce rendez-vous doit avoir lieu avant la fin de l’année”, a déclaré Reporters sans frontières.
Cent fois menacé
Directeur du programme "El látigo contra la corrupción" (“le fouet contre la corruption”) pour la chaîne Globo TV à Tegucigalpa, Mario Castro Rodríguez a fait état d’une centaine de messages l’avertissant de sa mort prochaine depuis le 8 septembre dernier, selon le Comité pour la libre expression (C-Libre), organisation hondurienne partenaire de Reporters sans frontières. Bien que bénéficiaire, avec son frère et collègue Edgardo, de mesures préventives sollicitées par la Commission interaméricaine des droits de l’homme (CIDH) auprès de l’État hondurien, le journaliste craint pour sa sécurité et même sa vie.
Mario Castro est un sympathisant du Front élargi de Résistance (FARP), le parti fondé par l’ancien président victime du coup d’État, Manuel Zelaya, depuis son retour au pays en mai dernier. Radio Globo et Globo TV ont été fortement exposés à la répression et à la censure dans les mois qui ont suivi le putsch, en raison de leur proximité avec l’ancien chef de l’État.
"Il serait magnifique qu’on vous bute, bandes de porcs", "Il vaut mieux qu’on vous descende tous", "Vieux vaurien, qu’on vous tue tous", "Ha, ha, ha, on tue les idiots, connard", sont des exemples de messages répétés en boucle et envoyés au journaliste depuis différents numéros. Certains font allusion aux mauvaises relations de l’intéressé avec la police. Mario Castro a également enduré, à plusieurs reprises, les filatures par des individus cagoulés et fortement armés circulant dans un véhicule blanc sans plaque d’immatriculation et aux vitres teintées. Attendu à chaque fois en début de nuit à la sortie du siège de Globo TV, le journaliste a été suivi jusqu’à son domicile.
Le programme conduit par les frères Mario et Edgardo Castro, lancé en mai 2010, s’est notamment distingué par ses dénonciations des actes de corruption commis sous le gouvernement, issu du coup d’État, de Roberto Micheletti (juin 2009-janvier 2010). Les deux frères traitent d’autres sujets sensibles comme la militarisation de la région de l’Aguán (Centre-Nord), source de très graves violations des droits de l’homme contre les communautés et mouvements paysans. L’assassinat, le 8 septembre dernier, d’un autre adhérent du FARP, Medardo Flores, de la station Radio Uno à San Pedro Sula, a porté à quinze le nombre de journalistes tués au Honduras en dix-huit mois. Tous ces drames demeurent à ce jour impunis.
Informations compromettantes
Coordinateur du programme “Thèmes et débats” pour la chaîne Canal 13 à Tegucigalpa, Edgardo Antonio Escoto Amador vit, lui aussi, sous la menace. Dans la nuit du 22 septembre dernier, le journaliste a été intercepté près de chez lui par deux individus circulant à moto. Armes de gros calibre au poing, les assaillants lui ont dérobé un ordinateur portable contenant, a-t-il expliqué à C-Libre, “de l’information confidentielle relative au coup d’État qui m’a été transmise, ainsi qu’à d’autres journalistes, il y a plusieurs mois et qui a causé l’irritation du général en retraite Miguel Ángel García Padgett”. Le journaliste a précisé faire l’objet de menaces et de filatures régulières après avoir refusé de céder aux pressions d’émissaires se réclamant de l’ancien militaire.
Miguel Ángel García Padgett compte parmi les quatre généraux à la manœuvre lors du coup d’État du 28 juin 2009. Son collègue Romeo Vásquez Velásquez a, quant à lui, été nommé à la tête de l’entreprise nationale de télécommunications Hondutel, le 8 mars 2010, au moment de son départ de l’armée. Edgardo Antonio Escoto Amador avait lui-même subi plusieurs arrestations violentes à l’époque du coup d’État.
mardi 4 octobre 2011
mercredi 14 septembre 2011
« Réconciliation » à la hondurienne
Par Maurice Lemoine
Septembre 2011
Signé le 22 mai dernier par l’ex-président Manuel Zelaya (renversé fin juin 2009 par un coup d’Etat) et l’actuel chef de l’Etat Porfirio Lobo, l’Accord dit « de Cartagena » était censé mettre un terme à la grave crise politique qui affecte le Honduras. Ayant pour véritable intitulé « Accord pour la réconciliation nationale et la consolidation du système démocratique dans la République du Honduras », il a permis à cette dernière d’être réadmise au sein de l’Organisation des Etats américains (OEA), le 1er juin 2011, et prétend, dans son paragraphe 5, « veiller de manière particulière au respect de la Constitution en ce qui concerne les garanties du respect et de la protection des droits humains ».
S’il a été paraphé malgré les sérieuses mises en garde d’une part non négligeable du mouvement social hondurien qui, durement réprimé, a vu en lui une façon insidieuse de faire oublier le golpe [1] et d’absoudre ses auteurs, cet accord n’en a pas moins permis le retour de M. Zelaya dans son pays, d’où il peut désormais assumer son rôle de dirigeant de l’opposition – le Front national de résistance populaire (FNRP). Tout irait donc pour le mieux dans le (presque) meilleur des mondes si la « communauté internationale » (en général) et l’OEA (en particulier) ne se désintéressaient totalement de la curieuse conception qu’a l’oligarchie hondurienne de la « réconciliation » et « des droits humains ».
Le 5 juin, quatre jours seulement après que, à San Salvador, les chefs d’Etats du continent (ou leurs ministres des affaires étrangères) aient célébré le retour « officiel » de la démocratie à Tegucigalpa et de Tegucigalpa au sein de l’OEA, le sang coulait à nouveau dans le Bas Aguán – région de la côte atlantique, au nord du pays, où trois mille cinq cents familles membres du Mouvement uni des paysans de l’Aguán (MUCA), du Mouvement paysan de l’Aguán (MCA) et du Mouvement authentique revendicatif paysan de l’Aguán (MARCA) occupent une partie des 20 000 hectares de terre que trois grands propriétaires terriens – MM. Reinaldo Canales, René Morales et Miguel Facussé – se sont indûment appropriés au fil des années. Ce 5 juin, donc, un fort contingent de policiers, de militaires et d’authentiques « paramilitaires » à la solde des terratenientes [2] attaquait les asentamientos (colonies) du MARCA, à Trinidad, San Isidro et San Estebán, avant d’envahir violemment les installations de l’Institut national agraire (INA), une entité semi-autonome de l’Etat, à Sinaloa. Au même moment, des inconnus interceptaient et assassinaient trois membres de la coopérative de San Estebán : José Recinos Aguilar, Joel Santamaría et Genaro Cuesta. Ce crime portait alors à trente-deux le nombre des paysans victimes de la répression.
Depuis, la mort poursuit son œuvre. Le 16 juillet, tombent Luis Alonso Ortiz Borjas et Constantino Morales Enamorado, de la communauté de Nueva Marañones (MUCA). Une semaine plus tard, le 23, des inconnus abattent Julián Alvarenga García, président de l’asentamiento Isla Uno (MUCA) et blessent gravement l’un de ses compagnons, M. Santos Dubón.
La confusion atteint son comble lorsque, les 14 et 15 août, un affrontement aux circonstances encore non élucidées coûte la vie à quatre sicaires de M. Facussé, en blessant onze autres, et quand, le lendemain, cinq personnes n’ayant rien à voir avec les conflits agraires de la zone sont froidement exécutées alors qu’elles sortent des bureaux de l’INA, à Sinaloa.
C’est toutefois le drame du 14 qui, et pour cause, fait sortir les autorités de leur léthargie : cette fois, les victimes ne sont pas des paysans en lutte mais des hommes de main du « maître de la terre » et roi de la palme africaine Miguel Facussé. Dirigeant l’INA avec rang de ministre, M. César Ham peut bien affirmer que ces faits de violence ne peuvent être attribués ni au MUCA, ni au MARCA, ni au MCA, le ministre de la sécurité Óscar Álvarez, sur ordres du président Lobo, lance l’ « opération Xatruch II ». Mille militaires et policiers sont dépêchés dans la région pour y « rétablir l’ordre » et procéder à un « désarmement » (sous-entendu : des paysans). Une opération similaire avait déjà eu lieu en décembre 2010… sans qu’aucune arme ne soit trouvée [3] !
Rétablir l’ordre ? Mais quel ordre ? Cette re-militarisation massive du Bas Aguán n’empêche nullement l’assassinat, le 20 août, de Secundino Ruiz, président de la coopérative San Isidro (MARCA) ; l’exécution et la décapitation, le 21 août, à La Concepción, du vice-président du MUCA Pedro Salgado et de son épouse Reina Mejía Licona ; la mort violente, le 2 septembre, d’Olvin David González Godoy, membre du MUCA, à proximité de la coopérative Marañones.
Le calme reviendra-t-il avec l’approbation par le Congrès, le 7 septembre, d’un décret affectant 4 712 hectares à sept communautés appartenant au MUCA et au MARCA ? Le 14 avril 2010, en effet, admettant que ses membres avaient le droit d’accéder à la terre, le président Lobo leur avait proposé, par l’intermédiaire de l’INA, 11 000 ha en trois parties (dont une première de 4 000 ha), à condition qu’elles abandonnent l’occupation de vingt-six fincas [4] et moyennant une indemnisation des pseudo propriétaires, MM. Morales et Facussé. Depuis, la transaction traînait en longueur, ouvertement sabotée par ce dernier : alors que le gouvernement proposait 110 000 lempiras par hectare (4 028 euros), il en réclamait 350 000 (12 800 euros). La négociation a finalement débouché sur 135 000 lempiras par hectare (4 963 euros), soit pour les 4 045,70 hectares de M. Facussé et les 667 ha de M. Morales, une somme de 636 millions de lempiras (23,3 millions d’euros) [5]. Bénéficiant d’un prêt au taux « préférentiel » de 10 %, les paysans devront les rembourser dans un délai de quinze ans – l’Etat se portant garant de ce remboursement.
Pour positif qu’il soit, cet accord, contesté par une majorité des intéressés car ne résolvant qu’une infime partie des conflits agraires, ne garantit en rien la fin des revendications et donc de la répression. Laquelle, par ailleurs, ne se cantonne pas au seul Bas Aguán. Le 22 août, l’étudiant Nahúm Guerra Guerrero, qui participait à l’occupation pacifique de l’Ecole d’agriculture Pompilio Ortega, à Santa Bárbara, est tombé sous le feu de tueurs circulant en automobile. Le 7 septembre, à Tegucigalpa, Mahadeo Roopachand Sadloo, dit « Emo », militant connu et très populaire du FNRP, a été fauché à son tour, à son domicile – une balle dans la tête, quatre dans le thorax. Le lendemain, à Puerto Cortés, le journaliste et trésorier du Front élargi de résistance populaire (FARP) pour le nord du pays [6], était victime des tueurs d’un escadron de la mort.
Face à l’hécatombe, les autorités font preuve d’une fertile imagination. Ainsi, la violence qui affecte le Bas Aguán serait-elle due à la présence d’un groupe (lire : une guérilla) « d’au moins trois cents hommes armés » obéissant aux ordres d’un individu nommé « El Comandante » et entraîné par « deux Nicaraguayens » – originaires, on l’aura compris, d’un pays membre de l’Alliance bolivarienne des peuples de notre Amérique (ALBA) [7]. En revanche, d’après le commissaire Marco Tulio Palma Rivera, chef de la Direction nationale d’investigation criminelle (DNIC), qui mène l’enquête sur le meurtre d’ « Emo », « l’hypothèse la plus forte est qu’il s’agit d’un crime de droit commun, sans caractère idéologique [8] ».
On ignore pour l’instant si la démission du ministre de la sécurité Óscar Álvarez, survenue le 9 septembre, à la demande du président Lobo, est due à son échec dans la lutte contre une insécurité galopante, ou si elle est une conséquence de pressions intervenues après les déclarations fracassantes qu’il a faites le 31 août : ce jour-là, en effet, il a dénoncé « qu’au moins dix officiers de la police nationale se sont transformés en “contrôleurs aériens” permettant l’atterrissage [au Honduras] de narco-avions qui transportent de la drogue du sud du continent jusqu’en Amérique du Nord [9] » et a annoncé qu’il voulait épurer l’institution.
Ce pavé dans la mare a fait d’autant plus d’effet que, quelques jours plus tard, il a été suivi de la publication, via WikiLeaks, d’un câble « secret » de l’ambassade américaine daté du 19 mars 2004 et intitulé « Un avion du narcotrafic brûlé dans la propriété d’un éminent Hondurien » [10]. Le document détaille comment, le 14 mars de cette année-là, un bimoteur chargé d’une tonne de cocaïne et provenant de Colombie a atterri sur l’une des propriétés de M. Miguel Facussé située à Farallones (côte nord du Honduras) ; comment le chargement fût transféré dans une caravane de véhicules escortés par trente hommes fortement armés ; comment l’aéronef fût brûlé, en plein jour, près de la piste d’atterrissage, et enterré le 15 au soir, avec l’aide d’un bulldozer. Sans mettre ouvertement en cause M. Facussé, le rapport signé par l’ambassadeur Larry Leon Palmer n’en rapporte pas moins que sa propriété « était fortement surveillée ce qui rend “questionnable” la version selon laquelle des étrangers auraient pu y pénétrer et utiliser la piste d’atterrissage sans autorisation », sachant par ailleurs « que Facussé était présent (…) au moment où ont eu lieu les faits ». Enfin, mentionne le câble, « cet incident marque la troisième occasion où, au cours des quinze derniers mois, l’on a vu des trafiquants de drogue en relation avec cette propriété de M. Facussé ».
Sans aller au-delà de ce que suggère ce document, on n’en comprend pas moins que, vu sous cet angle, certaines « élites » du Bas Aguan préfèrent voir la zone fourmiller de paramilitaires et de policiers que… de paysans.
[1] Coup d’Etat.
[2] Grands propriétaires.
[3] Lire « Bras de fer au Honduras », Le Monde diplomatique, juin 2011.
[4] Propriété.
[5] Sont concernées les fincas La Aurora, La Confianza, Isla 1 et 2, Marañones, La Concepción, La Lempira et San Estebán.
[6] Après le retour d’exil de M. Zelaya, la résistance populaire a pris la décision de constituer un Front élargi (FARP) regroupant le FNRP et d’autres secteurs de l’opposition, en vue des élections prévues en 2013.
[7] L’ALBA regroupe la Bolivie, Cuba, la Dominique, l’Equateur, le Nicaragua, le Venezuela, Saint-Vincent-et-les-Grenadines, Antigua et Barbuda ; le Honduras en faisait partie avant le coup d’Etat.
[8] El Heraldo, Tegucigalpa, 9 septembre 2011.
[9] La Prensa, Tegucigalpa, 1er septembre 2011.
[10] Radio La Primerísima, Tegucigalpa, 3 septembre 2011.
Septembre 2011
Signé le 22 mai dernier par l’ex-président Manuel Zelaya (renversé fin juin 2009 par un coup d’Etat) et l’actuel chef de l’Etat Porfirio Lobo, l’Accord dit « de Cartagena » était censé mettre un terme à la grave crise politique qui affecte le Honduras. Ayant pour véritable intitulé « Accord pour la réconciliation nationale et la consolidation du système démocratique dans la République du Honduras », il a permis à cette dernière d’être réadmise au sein de l’Organisation des Etats américains (OEA), le 1er juin 2011, et prétend, dans son paragraphe 5, « veiller de manière particulière au respect de la Constitution en ce qui concerne les garanties du respect et de la protection des droits humains ».
S’il a été paraphé malgré les sérieuses mises en garde d’une part non négligeable du mouvement social hondurien qui, durement réprimé, a vu en lui une façon insidieuse de faire oublier le golpe [1] et d’absoudre ses auteurs, cet accord n’en a pas moins permis le retour de M. Zelaya dans son pays, d’où il peut désormais assumer son rôle de dirigeant de l’opposition – le Front national de résistance populaire (FNRP). Tout irait donc pour le mieux dans le (presque) meilleur des mondes si la « communauté internationale » (en général) et l’OEA (en particulier) ne se désintéressaient totalement de la curieuse conception qu’a l’oligarchie hondurienne de la « réconciliation » et « des droits humains ».
Le 5 juin, quatre jours seulement après que, à San Salvador, les chefs d’Etats du continent (ou leurs ministres des affaires étrangères) aient célébré le retour « officiel » de la démocratie à Tegucigalpa et de Tegucigalpa au sein de l’OEA, le sang coulait à nouveau dans le Bas Aguán – région de la côte atlantique, au nord du pays, où trois mille cinq cents familles membres du Mouvement uni des paysans de l’Aguán (MUCA), du Mouvement paysan de l’Aguán (MCA) et du Mouvement authentique revendicatif paysan de l’Aguán (MARCA) occupent une partie des 20 000 hectares de terre que trois grands propriétaires terriens – MM. Reinaldo Canales, René Morales et Miguel Facussé – se sont indûment appropriés au fil des années. Ce 5 juin, donc, un fort contingent de policiers, de militaires et d’authentiques « paramilitaires » à la solde des terratenientes [2] attaquait les asentamientos (colonies) du MARCA, à Trinidad, San Isidro et San Estebán, avant d’envahir violemment les installations de l’Institut national agraire (INA), une entité semi-autonome de l’Etat, à Sinaloa. Au même moment, des inconnus interceptaient et assassinaient trois membres de la coopérative de San Estebán : José Recinos Aguilar, Joel Santamaría et Genaro Cuesta. Ce crime portait alors à trente-deux le nombre des paysans victimes de la répression.
Depuis, la mort poursuit son œuvre. Le 16 juillet, tombent Luis Alonso Ortiz Borjas et Constantino Morales Enamorado, de la communauté de Nueva Marañones (MUCA). Une semaine plus tard, le 23, des inconnus abattent Julián Alvarenga García, président de l’asentamiento Isla Uno (MUCA) et blessent gravement l’un de ses compagnons, M. Santos Dubón.
La confusion atteint son comble lorsque, les 14 et 15 août, un affrontement aux circonstances encore non élucidées coûte la vie à quatre sicaires de M. Facussé, en blessant onze autres, et quand, le lendemain, cinq personnes n’ayant rien à voir avec les conflits agraires de la zone sont froidement exécutées alors qu’elles sortent des bureaux de l’INA, à Sinaloa.
C’est toutefois le drame du 14 qui, et pour cause, fait sortir les autorités de leur léthargie : cette fois, les victimes ne sont pas des paysans en lutte mais des hommes de main du « maître de la terre » et roi de la palme africaine Miguel Facussé. Dirigeant l’INA avec rang de ministre, M. César Ham peut bien affirmer que ces faits de violence ne peuvent être attribués ni au MUCA, ni au MARCA, ni au MCA, le ministre de la sécurité Óscar Álvarez, sur ordres du président Lobo, lance l’ « opération Xatruch II ». Mille militaires et policiers sont dépêchés dans la région pour y « rétablir l’ordre » et procéder à un « désarmement » (sous-entendu : des paysans). Une opération similaire avait déjà eu lieu en décembre 2010… sans qu’aucune arme ne soit trouvée [3] !
Rétablir l’ordre ? Mais quel ordre ? Cette re-militarisation massive du Bas Aguán n’empêche nullement l’assassinat, le 20 août, de Secundino Ruiz, président de la coopérative San Isidro (MARCA) ; l’exécution et la décapitation, le 21 août, à La Concepción, du vice-président du MUCA Pedro Salgado et de son épouse Reina Mejía Licona ; la mort violente, le 2 septembre, d’Olvin David González Godoy, membre du MUCA, à proximité de la coopérative Marañones.
Le calme reviendra-t-il avec l’approbation par le Congrès, le 7 septembre, d’un décret affectant 4 712 hectares à sept communautés appartenant au MUCA et au MARCA ? Le 14 avril 2010, en effet, admettant que ses membres avaient le droit d’accéder à la terre, le président Lobo leur avait proposé, par l’intermédiaire de l’INA, 11 000 ha en trois parties (dont une première de 4 000 ha), à condition qu’elles abandonnent l’occupation de vingt-six fincas [4] et moyennant une indemnisation des pseudo propriétaires, MM. Morales et Facussé. Depuis, la transaction traînait en longueur, ouvertement sabotée par ce dernier : alors que le gouvernement proposait 110 000 lempiras par hectare (4 028 euros), il en réclamait 350 000 (12 800 euros). La négociation a finalement débouché sur 135 000 lempiras par hectare (4 963 euros), soit pour les 4 045,70 hectares de M. Facussé et les 667 ha de M. Morales, une somme de 636 millions de lempiras (23,3 millions d’euros) [5]. Bénéficiant d’un prêt au taux « préférentiel » de 10 %, les paysans devront les rembourser dans un délai de quinze ans – l’Etat se portant garant de ce remboursement.
Pour positif qu’il soit, cet accord, contesté par une majorité des intéressés car ne résolvant qu’une infime partie des conflits agraires, ne garantit en rien la fin des revendications et donc de la répression. Laquelle, par ailleurs, ne se cantonne pas au seul Bas Aguán. Le 22 août, l’étudiant Nahúm Guerra Guerrero, qui participait à l’occupation pacifique de l’Ecole d’agriculture Pompilio Ortega, à Santa Bárbara, est tombé sous le feu de tueurs circulant en automobile. Le 7 septembre, à Tegucigalpa, Mahadeo Roopachand Sadloo, dit « Emo », militant connu et très populaire du FNRP, a été fauché à son tour, à son domicile – une balle dans la tête, quatre dans le thorax. Le lendemain, à Puerto Cortés, le journaliste et trésorier du Front élargi de résistance populaire (FARP) pour le nord du pays [6], était victime des tueurs d’un escadron de la mort.
Face à l’hécatombe, les autorités font preuve d’une fertile imagination. Ainsi, la violence qui affecte le Bas Aguán serait-elle due à la présence d’un groupe (lire : une guérilla) « d’au moins trois cents hommes armés » obéissant aux ordres d’un individu nommé « El Comandante » et entraîné par « deux Nicaraguayens » – originaires, on l’aura compris, d’un pays membre de l’Alliance bolivarienne des peuples de notre Amérique (ALBA) [7]. En revanche, d’après le commissaire Marco Tulio Palma Rivera, chef de la Direction nationale d’investigation criminelle (DNIC), qui mène l’enquête sur le meurtre d’ « Emo », « l’hypothèse la plus forte est qu’il s’agit d’un crime de droit commun, sans caractère idéologique [8] ».
On ignore pour l’instant si la démission du ministre de la sécurité Óscar Álvarez, survenue le 9 septembre, à la demande du président Lobo, est due à son échec dans la lutte contre une insécurité galopante, ou si elle est une conséquence de pressions intervenues après les déclarations fracassantes qu’il a faites le 31 août : ce jour-là, en effet, il a dénoncé « qu’au moins dix officiers de la police nationale se sont transformés en “contrôleurs aériens” permettant l’atterrissage [au Honduras] de narco-avions qui transportent de la drogue du sud du continent jusqu’en Amérique du Nord [9] » et a annoncé qu’il voulait épurer l’institution.
Ce pavé dans la mare a fait d’autant plus d’effet que, quelques jours plus tard, il a été suivi de la publication, via WikiLeaks, d’un câble « secret » de l’ambassade américaine daté du 19 mars 2004 et intitulé « Un avion du narcotrafic brûlé dans la propriété d’un éminent Hondurien » [10]. Le document détaille comment, le 14 mars de cette année-là, un bimoteur chargé d’une tonne de cocaïne et provenant de Colombie a atterri sur l’une des propriétés de M. Miguel Facussé située à Farallones (côte nord du Honduras) ; comment le chargement fût transféré dans une caravane de véhicules escortés par trente hommes fortement armés ; comment l’aéronef fût brûlé, en plein jour, près de la piste d’atterrissage, et enterré le 15 au soir, avec l’aide d’un bulldozer. Sans mettre ouvertement en cause M. Facussé, le rapport signé par l’ambassadeur Larry Leon Palmer n’en rapporte pas moins que sa propriété « était fortement surveillée ce qui rend “questionnable” la version selon laquelle des étrangers auraient pu y pénétrer et utiliser la piste d’atterrissage sans autorisation », sachant par ailleurs « que Facussé était présent (…) au moment où ont eu lieu les faits ». Enfin, mentionne le câble, « cet incident marque la troisième occasion où, au cours des quinze derniers mois, l’on a vu des trafiquants de drogue en relation avec cette propriété de M. Facussé ».
Sans aller au-delà de ce que suggère ce document, on n’en comprend pas moins que, vu sous cet angle, certaines « élites » du Bas Aguan préfèrent voir la zone fourmiller de paramilitaires et de policiers que… de paysans.
[1] Coup d’Etat.
[2] Grands propriétaires.
[3] Lire « Bras de fer au Honduras », Le Monde diplomatique, juin 2011.
[4] Propriété.
[5] Sont concernées les fincas La Aurora, La Confianza, Isla 1 et 2, Marañones, La Concepción, La Lempira et San Estebán.
[6] Après le retour d’exil de M. Zelaya, la résistance populaire a pris la décision de constituer un Front élargi (FARP) regroupant le FNRP et d’autres secteurs de l’opposition, en vue des élections prévues en 2013.
[7] L’ALBA regroupe la Bolivie, Cuba, la Dominique, l’Equateur, le Nicaragua, le Venezuela, Saint-Vincent-et-les-Grenadines, Antigua et Barbuda ; le Honduras en faisait partie avant le coup d’Etat.
[8] El Heraldo, Tegucigalpa, 9 septembre 2011.
[9] La Prensa, Tegucigalpa, 1er septembre 2011.
[10] Radio La Primerísima, Tegucigalpa, 3 septembre 2011.
mercredi 17 août 2011
L’extrême droite hondurienne repasse à l’offensive
Par Maurice Lemoine
Le 22 mai, le président hondurien Porfirio Lobo et l’ex-chef de l’Etat Manuel Zelaya, renversé en juin 2009, signaient à Cartagena de Indias (Colombie) l’Accord pour la réconciliation nationale et la consolidation du système démocratique dans la République du Honduras. Leurs homologues colombien et vénézuélien Juan Manuel Santos et Hugo Chávez, qui avaient œuvré en tant que médiateurs lors des négociations ayant mené à ce dénouement, leur ont servi de témoins.
En permettant le retour dans son pays de M. Zelaya, jusque-là réfugié en République Dominicaine, cet accord a facilité la réincorporation du Honduras au sein de l’Organisation des Etats américains (OEA), survenue le 1er juin et approuvée par la totalité des pays membres, à l’exception de l’Equateur.
Si la fin de l’éloignement de « Mel », comme on appelle familièrement l’ancien chef de l’Etat, a provoqué une vague d’enthousiasme au sein du Front national de résistance populaire (FNRP), la réintégration express et concomitante du pays dans l’OEA y a produit un fort malaise et une évidente confusion.
Au terme d’une assemblée générale réunissant mille cinq cents délégués, les 26 et 27 février, le Front avait publiquement fait connaître ses exigences pour une sortie de crise : le retour en toute sécurité des exilés, dont l’ancien président (alors sous le coup de plusieurs procès montés de toutes pièces après son éviction ) ; la non participation à un quelconque processus électoral ; le démantèlement des structures golpistas [1] et le châtiment des responsables. Il avait également annoncé l’auto-convocation d’une Assemblée nationale constituante (ANC) « participative et démocratique », pour le 28 juin. Or, avec l’assentiment de M. Zelaya (et de M. Chávez, considéré par le FNRP comme son plus fidèle allié sur la scène internationale), l’Accord de Cartagena ne satisfait que le premier de ces points.
Bénéficiant d’une totale impunité, les organisateurs et bénéficiaires de la rupture constitutionnelle sont toujours incrustés dans les structures de l’Etat et du gouvernement Lobo. La répression n’a pas cessé. « L’Etat de droit est brisé et ses décombres demeurent entre les mains de ceux qui ont promu, accepté et défendu le golpe », s’insurgeait Mme Bertha Oliva, dirigeante du Comité des familles de détenus-disparus du Honduras (Cofadeh), dès le 2 juin, exprimant un sentiment très répandu. « Comment pouvons-nous répondre au peuple qui réclame justice et liberté ? » D’où le malaise latent.
Alors que, depuis le coup d’Etat, ce sont les bases du Front qui, refusant de reconnaître la légitimité des gouvernements de MM. Roberto Micheletti (le putschiste) et Lobo (issu d’élections « illégitimes »), ont affronté et subi la repression, le sentiment a prévalu que le mouvement, en tant que tel, n’avait pu qu’entériner une négociation menée en dehors de lui, par MM. Santos, Chávez, Lobo et Zelaya – un accord de « chefs » laissant le peuple de côté.
Il eût fallu être aveugle ou sourd pour ne pas prendre conscience du sentiment de frustration, et même parfois de colère ,régnant à Tegucigalpa. Outre Quito, Caracas (mais peut-être trop tardivement) s’en préoccupa. Le 1er juin, lors de l’Assemblée générale de l’OEA au cours de laquelle le Honduras devait retrouver son siège, le ministre des affaires étrangères vénézuélien Nicolás Maduro ne ménagea pas sa peine, pendant de longues heures, pour que soit inclus, dans la résolution, « un élément ayant à voir avec la lutte contre l’impunité et le respect des droits de l’homme ». Ses efforts n’ayant pas abouti, le Venezuela, sans rejoindre la position très ferme de l’Equateur, votera « pour la réintégration », mais en exprimant des « réserves » [2].
Pour autant, on ne résout pas un problème en le compliquant davantage : conscient d’avoir triomphé de la ligne des pustschistes qui refusaient la présence de M. Zelaya au Honduras, le FNRP a retrouvé son dirigeant – le seul, par son charisme, à même de fédérer le mouvement, et donc à lui permettre de possibles futures victoires – et serre les rangs. Et, M. Zelaya en tête, il dénonce les premiers « accrocs » aux Accords de Cartagena. Car ceux qui ont contesté la légitimation du gouvernement Lobo et le « blanchiment du coup d’Etat » qu’a entraîné de facto le retour au sein de l’OEA n’avaient pas, pour le faire, que de mauvaises raisons.
Depuis cette « normalisation », trois nouveaux paysans ont été assassinés et trois autres blessés par les paramilitaires à la solde des terratenientes [3], dans le Bas Aguán ; un autre est porté disparu depuis le 15 mai. Ces crimes portent le nombre des victimes des sicarios et des forces de sécurité à 32 morts, depuis janvier 2010, dans cette région.
Le 15 juin, M. Enrique Flores Lanza, ex-ministre de la présidence de M. Zelaya, a dû se présenter devant la justice. Membre de la Commission politique du FNRP, exilé au Nicaragua et revenu à Tegucigalpa, le 28 mai, dans le même avion que l’ancien chef de l’Etat, il est accusé d’avoir « détourné » des fonds publics pour mener campagne en faveur de la consultation populaire parfaitement légale que celui-ci voulait organiser, et qui lui a valu d’être renversé. Or, l’un des paragraphes de l’Accord « pour la réconciliation nationale » signé par M. Lobo mentionne « l’engagement assumé par le gouvernement de garantir à l’ex-président Manuel Zelaya, ainsi qu’aux autres ex-membres de son gouvernement, l’exercice de toute leur liberté d’action politique et toutes les garanties envisagées dans la Constitution et les lois du Honduras (…) ». Il est également précisé que ces ex-fonctionnaires, au cas où ils auraient à répondre devant la justice, pourraient exercer leur défense « en liberté ».
Ce 15 juin, le juge Claudio Aguilar a placé M. Flores Lanza en détention à domicile, lui donnant un délai d’un mois pour réunir une caution de 27 millions de lempiras – quasiment un million d’euros –, somme exorbitante, jamais demandée dans le pays à aucun prévenu. Si, au terme de trente jours, il n’a pu présenter cette somme, dont il a déjà précisé qu’il ne peut la payer, il sera placé en détention préventive, dans une prison de droit commun.
Tandis que le FNRP, en tant qu’organisation, demande à la communauté internationale « de se prononcer contre ce nouvel acte arbitraire qui constitue un dangereux sabotage des tentatives de donner une sortie pacifique et politique à la crise vécue depuis le coup d’Etat de 2009 », son coordinateur général, M. Zelaya, dénonce : cette décision de « justice » (institution notoirement impliquée dans le golpe) « viole l’accord signé à Cartagena de Indias ».
Le président Lobo navigue à vue. Son aval au retour de l’ennemi juré a provoqué la fureur des secteurs golpistas. Depuis le début du mois de juin, une campagne médiatique menée en particulier par les quotidiens El Heraldo et La Prensa (propriétés de M. Jorge Canahuati Larach, l’une des figures les plus en vue de l’oligarchie) l’accusent implicitement d’avoir passé « un pacte secret » avec… M. Chávez. L’affirmation repose sur l’interception (par qui ? comment ?) d’un supposé câble destiné à Caracas et relatant une conversation entre le chargé d’affaires vénézuélien à l’ambassade de Tegucigalpa, M. Ariel Vargas, et le chef de l’Etat hondurien, à la mi-mai. Ne niant pas cette rencontre, M. Lobo a précisé qu’elle avait pour objet de demander au président bolivarien la reprise des relations diplomatiques et sa médiation pour que le Honduras rejoigne l’OEA.
Probable candidat du Parti libéral (PL) lors de la prochaine élection présidentielle [4], M. Lucio Izaguirre a appelé les députés du Congrès à organiser immédiatement un référendum « pour savoir si le président Lobo doit ou non continuer à exercer le pouvoir, car il a menti au peuple [en passant un « pacte secret » avec M. Chávez] et qu’un président qui ment à son peuple ne peut continuer dans l’exercice de la présidence [5] ».
Ayant peut-être les « intérêts supérieurs du pays » à l’esprit, mais surtout peu désireux de finir comme « Mel », en pyjama, dans un avion, un petit matin blême, M. Lobo a expliqué que Cartagena « n’a pas pour objet d’éviter l’application de la justice ni de “blinder ” des cas de corruption », et que « personne n’est au-dessus de la loi ».
C’est ainsi que, membre à part entière de l’OEA et ayant réintégré avec honneur la « communauté internationale », le Honduras compte un éminent prisonnier politique : l’ancien ministre de la présidence Flores Lanza.
Publié dans Memoire des Luttes
publié : le 22 juin 2011
Le 22 mai, le président hondurien Porfirio Lobo et l’ex-chef de l’Etat Manuel Zelaya, renversé en juin 2009, signaient à Cartagena de Indias (Colombie) l’Accord pour la réconciliation nationale et la consolidation du système démocratique dans la République du Honduras. Leurs homologues colombien et vénézuélien Juan Manuel Santos et Hugo Chávez, qui avaient œuvré en tant que médiateurs lors des négociations ayant mené à ce dénouement, leur ont servi de témoins.
En permettant le retour dans son pays de M. Zelaya, jusque-là réfugié en République Dominicaine, cet accord a facilité la réincorporation du Honduras au sein de l’Organisation des Etats américains (OEA), survenue le 1er juin et approuvée par la totalité des pays membres, à l’exception de l’Equateur.
Si la fin de l’éloignement de « Mel », comme on appelle familièrement l’ancien chef de l’Etat, a provoqué une vague d’enthousiasme au sein du Front national de résistance populaire (FNRP), la réintégration express et concomitante du pays dans l’OEA y a produit un fort malaise et une évidente confusion.
Au terme d’une assemblée générale réunissant mille cinq cents délégués, les 26 et 27 février, le Front avait publiquement fait connaître ses exigences pour une sortie de crise : le retour en toute sécurité des exilés, dont l’ancien président (alors sous le coup de plusieurs procès montés de toutes pièces après son éviction ) ; la non participation à un quelconque processus électoral ; le démantèlement des structures golpistas [1] et le châtiment des responsables. Il avait également annoncé l’auto-convocation d’une Assemblée nationale constituante (ANC) « participative et démocratique », pour le 28 juin. Or, avec l’assentiment de M. Zelaya (et de M. Chávez, considéré par le FNRP comme son plus fidèle allié sur la scène internationale), l’Accord de Cartagena ne satisfait que le premier de ces points.
Bénéficiant d’une totale impunité, les organisateurs et bénéficiaires de la rupture constitutionnelle sont toujours incrustés dans les structures de l’Etat et du gouvernement Lobo. La répression n’a pas cessé. « L’Etat de droit est brisé et ses décombres demeurent entre les mains de ceux qui ont promu, accepté et défendu le golpe », s’insurgeait Mme Bertha Oliva, dirigeante du Comité des familles de détenus-disparus du Honduras (Cofadeh), dès le 2 juin, exprimant un sentiment très répandu. « Comment pouvons-nous répondre au peuple qui réclame justice et liberté ? » D’où le malaise latent.
Alors que, depuis le coup d’Etat, ce sont les bases du Front qui, refusant de reconnaître la légitimité des gouvernements de MM. Roberto Micheletti (le putschiste) et Lobo (issu d’élections « illégitimes »), ont affronté et subi la repression, le sentiment a prévalu que le mouvement, en tant que tel, n’avait pu qu’entériner une négociation menée en dehors de lui, par MM. Santos, Chávez, Lobo et Zelaya – un accord de « chefs » laissant le peuple de côté.
Il eût fallu être aveugle ou sourd pour ne pas prendre conscience du sentiment de frustration, et même parfois de colère ,régnant à Tegucigalpa. Outre Quito, Caracas (mais peut-être trop tardivement) s’en préoccupa. Le 1er juin, lors de l’Assemblée générale de l’OEA au cours de laquelle le Honduras devait retrouver son siège, le ministre des affaires étrangères vénézuélien Nicolás Maduro ne ménagea pas sa peine, pendant de longues heures, pour que soit inclus, dans la résolution, « un élément ayant à voir avec la lutte contre l’impunité et le respect des droits de l’homme ». Ses efforts n’ayant pas abouti, le Venezuela, sans rejoindre la position très ferme de l’Equateur, votera « pour la réintégration », mais en exprimant des « réserves » [2].
Pour autant, on ne résout pas un problème en le compliquant davantage : conscient d’avoir triomphé de la ligne des pustschistes qui refusaient la présence de M. Zelaya au Honduras, le FNRP a retrouvé son dirigeant – le seul, par son charisme, à même de fédérer le mouvement, et donc à lui permettre de possibles futures victoires – et serre les rangs. Et, M. Zelaya en tête, il dénonce les premiers « accrocs » aux Accords de Cartagena. Car ceux qui ont contesté la légitimation du gouvernement Lobo et le « blanchiment du coup d’Etat » qu’a entraîné de facto le retour au sein de l’OEA n’avaient pas, pour le faire, que de mauvaises raisons.
Depuis cette « normalisation », trois nouveaux paysans ont été assassinés et trois autres blessés par les paramilitaires à la solde des terratenientes [3], dans le Bas Aguán ; un autre est porté disparu depuis le 15 mai. Ces crimes portent le nombre des victimes des sicarios et des forces de sécurité à 32 morts, depuis janvier 2010, dans cette région.
Le 15 juin, M. Enrique Flores Lanza, ex-ministre de la présidence de M. Zelaya, a dû se présenter devant la justice. Membre de la Commission politique du FNRP, exilé au Nicaragua et revenu à Tegucigalpa, le 28 mai, dans le même avion que l’ancien chef de l’Etat, il est accusé d’avoir « détourné » des fonds publics pour mener campagne en faveur de la consultation populaire parfaitement légale que celui-ci voulait organiser, et qui lui a valu d’être renversé. Or, l’un des paragraphes de l’Accord « pour la réconciliation nationale » signé par M. Lobo mentionne « l’engagement assumé par le gouvernement de garantir à l’ex-président Manuel Zelaya, ainsi qu’aux autres ex-membres de son gouvernement, l’exercice de toute leur liberté d’action politique et toutes les garanties envisagées dans la Constitution et les lois du Honduras (…) ». Il est également précisé que ces ex-fonctionnaires, au cas où ils auraient à répondre devant la justice, pourraient exercer leur défense « en liberté ».
Ce 15 juin, le juge Claudio Aguilar a placé M. Flores Lanza en détention à domicile, lui donnant un délai d’un mois pour réunir une caution de 27 millions de lempiras – quasiment un million d’euros –, somme exorbitante, jamais demandée dans le pays à aucun prévenu. Si, au terme de trente jours, il n’a pu présenter cette somme, dont il a déjà précisé qu’il ne peut la payer, il sera placé en détention préventive, dans une prison de droit commun.
Tandis que le FNRP, en tant qu’organisation, demande à la communauté internationale « de se prononcer contre ce nouvel acte arbitraire qui constitue un dangereux sabotage des tentatives de donner une sortie pacifique et politique à la crise vécue depuis le coup d’Etat de 2009 », son coordinateur général, M. Zelaya, dénonce : cette décision de « justice » (institution notoirement impliquée dans le golpe) « viole l’accord signé à Cartagena de Indias ».
Le président Lobo navigue à vue. Son aval au retour de l’ennemi juré a provoqué la fureur des secteurs golpistas. Depuis le début du mois de juin, une campagne médiatique menée en particulier par les quotidiens El Heraldo et La Prensa (propriétés de M. Jorge Canahuati Larach, l’une des figures les plus en vue de l’oligarchie) l’accusent implicitement d’avoir passé « un pacte secret » avec… M. Chávez. L’affirmation repose sur l’interception (par qui ? comment ?) d’un supposé câble destiné à Caracas et relatant une conversation entre le chargé d’affaires vénézuélien à l’ambassade de Tegucigalpa, M. Ariel Vargas, et le chef de l’Etat hondurien, à la mi-mai. Ne niant pas cette rencontre, M. Lobo a précisé qu’elle avait pour objet de demander au président bolivarien la reprise des relations diplomatiques et sa médiation pour que le Honduras rejoigne l’OEA.
Probable candidat du Parti libéral (PL) lors de la prochaine élection présidentielle [4], M. Lucio Izaguirre a appelé les députés du Congrès à organiser immédiatement un référendum « pour savoir si le président Lobo doit ou non continuer à exercer le pouvoir, car il a menti au peuple [en passant un « pacte secret » avec M. Chávez] et qu’un président qui ment à son peuple ne peut continuer dans l’exercice de la présidence [5] ».
Ayant peut-être les « intérêts supérieurs du pays » à l’esprit, mais surtout peu désireux de finir comme « Mel », en pyjama, dans un avion, un petit matin blême, M. Lobo a expliqué que Cartagena « n’a pas pour objet d’éviter l’application de la justice ni de “blinder ” des cas de corruption », et que « personne n’est au-dessus de la loi ».
C’est ainsi que, membre à part entière de l’OEA et ayant réintégré avec honneur la « communauté internationale », le Honduras compte un éminent prisonnier politique : l’ancien ministre de la présidence Flores Lanza.
Publié dans Memoire des Luttes
publié : le 22 juin 2011
lundi 27 juin 2011
Rassemblement 28 juin 17h30 Ambassade du Honduras
La Plateforme belge pour la démocratie au Honduras
invite à un rassemblement,
ce mardi 28 juin à 17h30, face à l'Ambassade du Honduras,
3, avenue des Gaulois, 1040 Bruxelles (Bus 80, Tram 81, Métro Mérode)
deux ans jour pour jour après le coup d'Etat par lequel le président élu légitimement
a été expulsé de son pays par les militaires après avoir transité par la
base militaire américaine locale.
Depuis que ce coup d'Etat odieux a été perpétré, on ne compte plus les assassinats
politiques, les détentions, les assassinats de journalistes et autres
atteintes à la liberté de la presse, les intimidations, les personnes
obligées à s'exiler. Les politiques de spoliation des paysans et d'indiens
ont repris de plus belle, ainsi que de saccage des matières premières du
pays, au profit d'entreprises transnationales ou d'investisseurs sans
scrupules.
A peine signé, l 'accord de Cartagena, qui a permis le retour du Honduras
au sein de l'OEA et le retour de Manuel Zelaya au Honduras, est déjà violé
par le gouvernement de fait.
Les auteurs du coup d'Etat, qui dirigent toujours le pays, ont bénéficié de
l'appui tacite des Etats-Unis et de l'Union européenne qui a décidé de
signer un accord de libre échange avec ce pays et le reste de l'Amérique
centrale, acceptant ainsi de traiter avec un gouvernement de fait, (comme
elle l'a fait dans le sud de la Méditerranée avec Ben Ali, entre autres).
Ce rassemblement a pour but d'appuyer le mouvement de résistance qui lutte
pour mettre fin au coup d'Etat et pour la démocratisation réelle du Honduras et
de réclamer de l'Union européenne et de la Belgique des politiques étrangères
respectueuses des droits de l'homme et de la démocratie, au lieu de celles qui
sont menées actuellement, qui donnent la priorité à de sombres
intérêts économiques.
invite à un rassemblement,
ce mardi 28 juin à 17h30, face à l'Ambassade du Honduras,
3, avenue des Gaulois, 1040 Bruxelles (Bus 80, Tram 81, Métro Mérode)
deux ans jour pour jour après le coup d'Etat par lequel le président élu légitimement
a été expulsé de son pays par les militaires après avoir transité par la
base militaire américaine locale.
Depuis que ce coup d'Etat odieux a été perpétré, on ne compte plus les assassinats
politiques, les détentions, les assassinats de journalistes et autres
atteintes à la liberté de la presse, les intimidations, les personnes
obligées à s'exiler. Les politiques de spoliation des paysans et d'indiens
ont repris de plus belle, ainsi que de saccage des matières premières du
pays, au profit d'entreprises transnationales ou d'investisseurs sans
scrupules.
A peine signé, l 'accord de Cartagena, qui a permis le retour du Honduras
au sein de l'OEA et le retour de Manuel Zelaya au Honduras, est déjà violé
par le gouvernement de fait.
Les auteurs du coup d'Etat, qui dirigent toujours le pays, ont bénéficié de
l'appui tacite des Etats-Unis et de l'Union européenne qui a décidé de
signer un accord de libre échange avec ce pays et le reste de l'Amérique
centrale, acceptant ainsi de traiter avec un gouvernement de fait, (comme
elle l'a fait dans le sud de la Méditerranée avec Ben Ali, entre autres).
Ce rassemblement a pour but d'appuyer le mouvement de résistance qui lutte
pour mettre fin au coup d'Etat et pour la démocratisation réelle du Honduras et
de réclamer de l'Union européenne et de la Belgique des politiques étrangères
respectueuses des droits de l'homme et de la démocratie, au lieu de celles qui
sont menées actuellement, qui donnent la priorité à de sombres
intérêts économiques.
mercredi 8 juin 2011
Inquiétude sur l’avenir des libertés publiques et des droits de l’homme après la réintégration du pays à l’OEA
uspendu de l’Organisation des États américains (OEA) depuis le coup d’État du 28 juin 2009, le Honduras y a repris sa place le 1er juin 2011 sur un vote quasi unanime des autres États, à l’exception de l’Équateur. L’Association mondiale des radios communautaires–Amérique latine et Caraïbes (Amarc-ALC) et Reporters sans frontières s’attendaient à cette décision, obtenue en contrepartie du retour au pays du président renversé Manuel “Mel” Zelaya, le 28 mai 2011. Nos deux organisations accueillent avec la plus grande vigilance, et même avec inquiétude, un processus qui suscite déjà de vives critiques au sein de la société hondurienne.
“L’unanimité des États n’est pas celle des citoyens. Encore moins celle des médias, journalistes et organisations de défense des droits de l’homme qu’Amarc-ALC et Reporters sans frontières soutiennent depuis deux ans. A plusieurs reprises, nos organisations ont exigé, à leur niveau, d’importantes contreparties au retour du Honduras dans le concert des nations américaines (http://fr.rsf.org/honduras-appel-d-amarc-alc-et-reporters-01-04-2011,39928.html) :
-la fin de l’impunité pour les crimes commis, notamment contre les journalistes et les défenseurs des droits de l’homme ; pour les agressions, attentats, sabotages et fermetures de médias, ainsi que le rétablissement des fréquences suspendues ou reprises. Le Honduras compte onze journalistes et un propriétaire de média tués depuis 2010. Quatre autres journalistes et un patron de presse ont survécu à des attentats ciblés depuis le début de l’année 2011 (http://fr.rsf.org/honduras-nouvelles-agressions-contre-la-29-04-2011,40182.html). Autant de cas impunis.
-la réforme de fond d’une législation de radiodiffusion et de télécommunications devenue obsolète et qui ne ménage aucune place à des médias communautaires et sociaux comme l’exigent justement les standards juridiques interaméricains ;
-l’accès à l’information publique sur les responsabilités dans les exactions les plus graves constatées depuis le coup d’État.
Ces points majeurs auraient dû constituer, selon nous, les préalables à une réintégration. Il importe, désormais, qu’ils soient pris rapidement en considération. Conclu le 22 mai dernier entre Manuel Zelaya et le président en exercice Porfirio Lobo, avec l’appui des gouvernements colombien et vénézuélien, l’accord de Carthagène des Indes n’aura imposé qu’une seule des quatre clauses préalables à la réadmission du Honduras dans l’OEA : le retour d’exil de Manuel Zelaya. Or, normalisation politique n’est pas justice. Cette situation ne garantit en rien le rétablissement réel des libertés publiques, du pluralisme et de l’État de droit”, ont déclaré les organisations.
Mouvement de protestation
Plusieurs organisations sociales et communautaires honduriennes ont choisi de se rassembler à San Salvador, où se tient l’assemblée générale de l’OEA, pour protester contre la résolution prise par cette dernière lors d’une session extraordinaire à Washington le 1er juin. Parmi elles figure le Conseil civique des organisations populaires et indigènes du Honduras (COPINH), dont deux radios affiliées, Guarajambala et La Voz Lenca, ont été réduites au silence en janvier dernier. Est également présente l’Association des habitants de la péninsule de Zacate Grande (ADEPZA) dont dépend la radio communautaire du même nom, persécutée depuis sa fondation par les propriétaires terriens de la région (http://fr.rsf.org/honduras-attentat-contre-le-directeur-de-la-16-03-2011,39802.html). Ismael Moreno, directeur de Radio Progreso (http://fr.rsf.org/honduras-radio-progreso-quand-l-armee-et-la-23-11-2009,35064.html) s’est, lui aussi, rendu dans la capitale salvadorienne pour y couvrir l’événement.
Les organisations présentes à San Salvador fustigent dans la réadmission du Honduras à l’OEA la “légitimation” du gouvernement issu du coup d’État. Elles rappellent, entre autres, l’impunité totale dont bénéficient les principaux artisans du putsch comme le général Romeo Vásquez Velásquez, nommé à la tête de la compagnie nationale de télécommunications Hondutel après sa retraite de l’armée, le 8 mars 2010.
“Au bout du compte, la signature des accords de Carthagène, le retour de Mel Zelaya, la réintégration dans l’OEA et le fait de ‘tourner la page’ ne signifient pas le retour à la paix et à la tranquillité sociale”, analyse Radio Progreso sur sa page Internet datée du 3 juin.
Les organisations honduriennes présentes à San Salvador entendent signifier qu’une normalisation sans justice est fort éloignée du processus de réconciliation que les pays membres de l’OEA prétendent impulser par le biais d’une réintégration du Honduras sans garanties suffisantes pour le respect des droits humains.
Benoît Hervieu
Despacho Américas / Americas desk
Reporters sans frontières
“L’unanimité des États n’est pas celle des citoyens. Encore moins celle des médias, journalistes et organisations de défense des droits de l’homme qu’Amarc-ALC et Reporters sans frontières soutiennent depuis deux ans. A plusieurs reprises, nos organisations ont exigé, à leur niveau, d’importantes contreparties au retour du Honduras dans le concert des nations américaines (http://fr.rsf.org/honduras-appel-d-amarc-alc-et-reporters-01-04-2011,39928.html) :
-la fin de l’impunité pour les crimes commis, notamment contre les journalistes et les défenseurs des droits de l’homme ; pour les agressions, attentats, sabotages et fermetures de médias, ainsi que le rétablissement des fréquences suspendues ou reprises. Le Honduras compte onze journalistes et un propriétaire de média tués depuis 2010. Quatre autres journalistes et un patron de presse ont survécu à des attentats ciblés depuis le début de l’année 2011 (http://fr.rsf.org/honduras-nouvelles-agressions-contre-la-29-04-2011,40182.html). Autant de cas impunis.
-la réforme de fond d’une législation de radiodiffusion et de télécommunications devenue obsolète et qui ne ménage aucune place à des médias communautaires et sociaux comme l’exigent justement les standards juridiques interaméricains ;
-l’accès à l’information publique sur les responsabilités dans les exactions les plus graves constatées depuis le coup d’État.
Ces points majeurs auraient dû constituer, selon nous, les préalables à une réintégration. Il importe, désormais, qu’ils soient pris rapidement en considération. Conclu le 22 mai dernier entre Manuel Zelaya et le président en exercice Porfirio Lobo, avec l’appui des gouvernements colombien et vénézuélien, l’accord de Carthagène des Indes n’aura imposé qu’une seule des quatre clauses préalables à la réadmission du Honduras dans l’OEA : le retour d’exil de Manuel Zelaya. Or, normalisation politique n’est pas justice. Cette situation ne garantit en rien le rétablissement réel des libertés publiques, du pluralisme et de l’État de droit”, ont déclaré les organisations.
Mouvement de protestation
Plusieurs organisations sociales et communautaires honduriennes ont choisi de se rassembler à San Salvador, où se tient l’assemblée générale de l’OEA, pour protester contre la résolution prise par cette dernière lors d’une session extraordinaire à Washington le 1er juin. Parmi elles figure le Conseil civique des organisations populaires et indigènes du Honduras (COPINH), dont deux radios affiliées, Guarajambala et La Voz Lenca, ont été réduites au silence en janvier dernier. Est également présente l’Association des habitants de la péninsule de Zacate Grande (ADEPZA) dont dépend la radio communautaire du même nom, persécutée depuis sa fondation par les propriétaires terriens de la région (http://fr.rsf.org/honduras-attentat-contre-le-directeur-de-la-16-03-2011,39802.html). Ismael Moreno, directeur de Radio Progreso (http://fr.rsf.org/honduras-radio-progreso-quand-l-armee-et-la-23-11-2009,35064.html) s’est, lui aussi, rendu dans la capitale salvadorienne pour y couvrir l’événement.
Les organisations présentes à San Salvador fustigent dans la réadmission du Honduras à l’OEA la “légitimation” du gouvernement issu du coup d’État. Elles rappellent, entre autres, l’impunité totale dont bénéficient les principaux artisans du putsch comme le général Romeo Vásquez Velásquez, nommé à la tête de la compagnie nationale de télécommunications Hondutel après sa retraite de l’armée, le 8 mars 2010.
“Au bout du compte, la signature des accords de Carthagène, le retour de Mel Zelaya, la réintégration dans l’OEA et le fait de ‘tourner la page’ ne signifient pas le retour à la paix et à la tranquillité sociale”, analyse Radio Progreso sur sa page Internet datée du 3 juin.
Les organisations honduriennes présentes à San Salvador entendent signifier qu’une normalisation sans justice est fort éloignée du processus de réconciliation que les pays membres de l’OEA prétendent impulser par le biais d’une réintégration du Honduras sans garanties suffisantes pour le respect des droits humains.
Benoît Hervieu
Despacho Américas / Americas desk
Reporters sans frontières
lundi 30 mai 2011
Manuel Zelaya, de retour en retour jusqu’au retour final
Par Maurice Lemoine, publié le 30 mai 2011
« Sí, se pudo ! » (« Oui, on a pu ! ») C’est par cette formidable ovation qu’une foule enthousiaste a, le samedi 28 mai, à Tegucigalpa, accueilli l’avion de la compagnie vénézuélienne Conviasa dans lequel, en provenance de Managua (Nicaragua), rentrait au pays « son » président, Manuel Zelaya, renversé par un coup d’Etat le 28 juin 2009.
Lors de ce retour rendu possible par l’accord signé avec le chef de l’Etat hondurien en exercice, Porfirio Lobo, grâce à la médiation des présidents colombien Juan Manuel Santos et vénézuélien Hugo Chávez, le 22 mai, à Cartagena de las Indias (Colombie), « Mel » comme on l’appelle affectueusement dans son pays, était accompagné par une délégation très représentative de l’importance que l’Amérique latine accorde à l’événement.
Etaient en effet présents à ses côtés : les ministres des affaires étrangères vénézuélien et bolivien Nicolás Maduro et David Choquehuanca ; le représentant de la présidence de la République Dominicaine (où Zelaya a vécu exil pendant seize mois) Miguel Mejía ; l’ancien président panaméen Martín Torrijos ; l’ex-sénatrice colombienne Piedad Córdoba ; des représentants des partis politiques de gauche récemment réunis à Managua, dans le cadre du Forum de São Paulo ; des membres des Parlements andin et centraméricain ; le prêtre catholique salvadorien Andrés Tamayo, expulsé par le gouvernement du putschiste Roberto Micheletti, pour sa proximité avec les secteurs populaires honduriens. La veille, étaient arrivés le secrétaire général de l’Organisation des Etats américains (OEA) José Miguel Insulza et la ministre des affaires étrangères colombienne María Ángela Holguín.
Sur la place Isis Obed Murillo – rebaptisée du nom d’une jeune femme assassinée à cet endroit par l’armée, une semaine après le coup d’Etat –, face aux drapeaux rouges du Front national de résistance populaire (FNRP) et bleus de la République du Honduras, Zelaya a remercié ses sympathisants pour s’être « maintenus sur le pied de guerre » et avoir « travaillé sans repos pour son retour », avant de rendre hommage « à ceux qui sont tombés dans cette bataille, à ceux qui ont versé leur sang sur cette place », allusion directe à Isis Obed Murillo. « Ce sang n’a pas coulé en vain. » Deux années d’une lutte particulièrement difficile ont vraisemblablement, à cet instant, re-défilé dans plus d’un esprit enfiévré.
Ce matin du dimanche 28 juin 2009, 15 000 urnes avaient été installées dans les parcs des principales agglomérations honduriennes. Après la collecte de presque 500 000 signatures, dans le cadre de la loi de participation citoyenne, la question qui devait être soumise aux électeurs était la suivante : « Etes-vous d’accord pour que, lors des élections générales de novembre 2009, soit installée une quatrième urne pour décider de la convocation d’une Assemblée nationale constituante destinée à élaborer une nouvelle Constitution politique ? » Déjà présent dans le pays, le directeur des opérations électorales de l’Organisation des Etats américains (OEA), Raúl Alconada, avait déclaré : « Espérons que cette participation se déroulera de manière pacifique et que les groupes politiques qui s’y sont opposés sauront faire une lecture appropriée de ce que signifie une participation politique citoyenne. » De puissants intérêts voyant d’un très mauvais œil ces prémisses d’une démocratie plus « participative », son souhait ne sera pas entendu.
Il est cinq heures du matin quand, obéissant aux ordres du général Romeo Vásquez, chef de l’état-major conjoint des forces armées, des militaires pénètrent dans la résidence du président Manuel Zelaya et le maîtrisent brutalement. Deux heures plus tard, après une escale de 45 minutes sur la base militaire américaine de Palmerola (située en territoire hondurien), un avion le déposera, en pyjama, sur une piste de l’aéroport international Juan Santamaría, à San José, au Costa Rica.
Avec l’accord de la quasi-totalité des députés, le président du Congrès, Roberto Micheletti, caudillo grotesque et anachronique aux allures de mafieux italien, membre comme Zelaya du Parti libéral (PL), prête serment pour le remplacer. Tandis qu’est instauré un couvre-feu et que la répression se déchaîne contre les milliers de partisans du chef de l’Etat légitime descendus dans la rue, la « communauté internationale » – OEA, Organisation des Nations unies (ONU), Union européenne, Système d’intégration centraméricain (SICA), Groupe de Rio, Alliance bolivarienne des peuples d’Amérique (ALBA), Union des nations sud-américaines (Unasur) – condamne le golpe [1].
Le 3 juillet, la Cour suprême de justice (CSJ) rejette la demande du secrétaire général de l’OEA, José Miguel Insulza, dépêché en hâte à Tegucigalpa pour obtenir le retour au pouvoir du chef de l’Etat renversé (et non « déchu » comme l’ont rabâché tant de médias !). Le traître Micheletti annonce que Zelaya sera jugé pour… trahison ! s’il rentre au Honduras. Peine perdue… Le 5 juillet, ayant pris place à bord d’un avion vénézuélien, le président légitime tente de se poser sur l’aéroport Toncontín de Tegucigalpa. La veille, dans un message transmis obligatoirement par toutes les chaînes de télévision, le cardinal Óscar Rodríguez a tenté de l’en dissuader : son retour risque de provoquer un bain de sang. Voilà pour le goupillon. Le sabre, lui, dès les premières heures de la matinée, occupe les abords de l’aéroport pour réprimer les manifestations et place des camions militaires en travers des deux pistes pour empêcher l’atterrissage du président. Qui doit renoncer. Provisoirement.
Les pressions exercées pour calmer ses ardeurs ne manquent pas. Le 7 juillet, alors que les Etats-Unis tentent d’obtenir l’accord du « président intérimaire » ( !) pour que Zelaya puisse terminer les six mois de gouvernement qui lui restent, « avec des pouvoirs limités et clairement définis » – c’est-à-dire avec les attributions d’une potiche –, la secrétaire d’Etat Hillary Clinton lui recommande de faire tout son possible pour éviter une situation comme celle vécue le dimanche précédent, quand il a survolé le pays. Dix jours plus tard, le porte-parole du Département d’Etat, Robert Wood, revient à la charge : il exprime clairement l’opposition de Washington à une nouvelle tentative de retour, estimant qu’une telle initiative « mettrait en danger les efforts de médiation du président costaricien Oscar Arias ». En effet, consciente de l’influence déterminante des gouvernements progressistes siégeant au sein de l’OEA, Hillary Clinton a habilement manœuvré avec ses alliés pour ôter à cet organisme la gestion du cas hondurien et pour le déposer entre des mains amies.
Alors que les demandes de prudence de la « communauté internationale » – à l’exception des pays membres de l’ALBA – se multiplient, Zelaya surgit à Las Manos, à la frontière honduro-nicaraguayenne, le 24 juillet. L’armée hondurienne a décrété le couvre-feu dans quatre municipios frontaliers et interdit le passage aux centaines de manifestants venus l’appuyer. Si leur président entre brièvement sur le territoire national, il doit rebrousser chemin pour éviter d’être arrêté.
Le pouvoir croit avoir gagné la partie. Fin août, démarre la campagne électorale qui, le 29 novembre suivant, permettra de faire passer par profits et pertes la rupture de l’ordre constitutionnel. C’est compter sans l’opiniâtreté et le courage de Zelaya. Le 21 septembre, 86 jours après avoir été expulsé par la force des baïonnettes, celui qui représente la volonté du peuple rentre clandestinement à Tegucigalpa et trouve refuge à l’ambassade du Brésil. Quelque 4 000 de ses partisans qui passent la nuit devant la résidence sont très violemment délogés – deux morts et trente blessés – le lendemain à l’aube.
Pendant les semaines qui suivent, Zelaya et ceux qui l’accompagnent vont subir un véritable calvaire, entourés d’un fort dispositif militaire et policier, privés d’eau, de téléphone, d’électricité, inondés de gaz toxiques, soumis à une torture physique et psychologique par l’émission de sons de haute fréquence et, la nuit, par de puissantes illuminations de projecteurs. Avec l’appui clairement exprimé du président brésilien Luiz Inácio Lula da Silva, qui met en garde Micheletti contre toute intervention dans l’ambassade, les insurgés tiennent bon.
En insufflant de l’énergie à ses partisans, la présence de Zelaya dans son pays oblige le médiateur Óscar Arias à s’activer pour sortir la négociation des manœuvres dilatoires dans lesquelles, à dessein, elle s’embourbait. Le 30 octobre, les représentants du gouvernement légitime et de la dictature s’entendent sur le rétablissement de Zelaya dans ses fonctions avant le 5 novembre, et sur la nomination d’un gouvernement d’unité et de réconciliation. Dans les faits, et tandis que le Congrès retarde le vote permettant le retour du chef d’Etat constitutionnel, Micheletti s’offre un cabinet qu’il dirige lui-même et en écarte tout représentant zelayiste, au mépris de ses engagements. Le 5 novembre, Zelaya met un terme à l’imposture : « A compter de cette date, et quoi qu’il arrive, je n’accepterai aucun accord de retour à la présidence de la République permettant de couvrir ce coup d’Etat. »
En phase avec son leader, le Front national de résistance contre le coup d’Etat (FNRG) annonce, le 9 novembre, que le délai fixé à San José pour le retour du président légitime étant dépassé, il ne reconnaîtra pas les élections générales qui doivent avoir lieu vingt jours plus tard. Multipliant les provocations, le Congrès annonce qu’il se réunira le 2 décembre – soit trois jours après le scrutin ! – pour décider d’un éventuel rétablissement de Zelaya dans ses fonctions. Au jour dit, laissant éclater au grand jour à quel point la négociation de San José a été une farce, les députés la rejettent (111 voix contre, 14 pour). Cela n’empêche pas les Etats-Unis de faire savoir qu’ils reconnaîtront la validité de la consultation à venir.
Le 27 janvier 2010, élu pour le compte du Parti national (PN), et au terme d’un scrutin organisé par un gouvernement illégitime, Porfirio Lobo accède à la présidence, comme si rien ne s’était passé. Dans son uniforme de gala, le général Vásquez défile à son côté. Faisant partie des trois seuls chefs d’Etat qui assistent à l’investiture [2], le président dominicain Leonel Fernández emmène Zelaya dans son avion du retour, en tant qu’ « hôte invité » de son pays. Nommé député à vie, Micheletti bénéficie d’une amnistie politique.
Tous les golpistas s’auto-absolvent, se récompensant les uns les autres et s’offrant des postes importants (le général Vásquez reçoit la direction de l’Entreprise hondurienne de télécommunications Hondutel). Autre acteur majeur du pronunciamento, le général Miguel Angel García Padgett est nommé attaché militaire à l’ambassade hondurienne à Mexico. Egalement complices du coup d’Etat et du régime de facto, les membres de la Cour suprême de justice (CSJ), du Ministère public (MP) et du Tribunal suprême électoral (TSE) sont maintenus à leurs postes, au sein d’un prétendu gouvernement d’unité et de réconciliation nationale.
En revanche, des mandats d’arrêt sont lancés contre Zelaya « pour avoir dépensé de manière illégale 57 millions de lempiras [2 millions d’euros] en frais de publicité » pour la consultation prétendument illicite du 28 juin. S’il rentre, il sera immédiatement arrêté. Cette situation ne semble guère troubler le prix Nobel de la paix Barack Obama : « Les Etats-Unis gèrent l’économie, l’armée, les relations internationales et les combustibles, s’emporte Zelaya, depuis Saint- Domingue. Je ne comprends pas pourquoi ils permettent qu’on élise un président ; il vaudrait mieux qu’ils nomment un gouverneur [3] ! »
Pourtant, la situation ainsi créée ne signifie pas une défaite définitive des forces démocratiques. Pendant tous ces mois, le mouvement populaire s’est renforcé et le FNRG – dont la revendication initiale était le retour inconditionnel du président – se transforme en Front national de résistance populaire (FNRP), avec comme coordinateur « Mel » Zelaya. Au premier objectif, qui demeure intangible, il en ajoute un second : la convocation d’une Assemblée nationale constituante (ANC) pour refonder l’Etat. La très dure répression déclenchée par le pouvoir fera (au minimum) une centaine de morts, mais, jamais, ne parviendra à affaiblir la détermination du mouvement.
Confronté à la montée en puissance de cette Résistance – qui, lors de son Assemblée des 26 et 27 février 2011, a annoncé l’auto-convocation d’une ANC -, exclu de l’OEA, non reconnu par l’Argentine, la Bolivie, le Brésil, l’Equateur, le Nicaragua, le Paraguay et le Venezuela, en proie à une grave crise économique (car ne bénéficiant plus du pétrole bon marché de Caracas !), le gouvernement hondurien doit impérativement desserrer l’étau en « normalisant » la situation.
La demande la plus pressante (la seule, en réalité) de la « communauté internationale » est le retour de Zelaya. Mettant en fureur ses secteurs les plus droitiers, Lobo a commencé à préparer le terrain en promulguant le décret 005-2011 (14 février 2011) par lequel il autorise la procureure générale Ethel Deras Enamorado à « s’abstenir de présenter des recours légaux ou d’autres actions judiciaires dans les procès en matière pénale actuellement en cours contre le citoyen José Manuel Zelaya Rosales ». Ensuite, il exercera une pression non dissimulée sur la Cour suprême de justice pour qu’elle annule les « procès pour corruption » (inventés de toutes pièces !) intentés contre Zelaya – ce qui sera fait le 3 mai. La veille, José Miguel Insulza avait anticipé cette issue en rappelant que l’annulation des deux jugements « pourrait permettre le retour du Honduras au sein de l’OEA ».
Trois semaines auparavant, le 9 avril, et chacun poursuivant des objectifs à la fois communs et divergents, les présidents colombien (allié inconditionnel de Washington) et vénézuélien (chef de file de l’anti-impérialisme dans la région) avaient créé une forte surprise en faisant connaître leur rôle conjoint de médiateurs (approuvé par Zelaya), lors d’une rencontre au cours de laquelle les deux ennemis jurés Lobo et Chávez s’étaient serré la main.
C’est cette démarche, appuyée au Honduras par le FNRP et, entre autres, à l’extérieur, par la résolution finale du XVIIe Forum de São Paulo, qui, le 22 mai, a abouti à la signature entre Lobo et Zelaya de l’Accord dit de Cartagena : Accord pour la réconciliation nationale et la consolidation du système démocratique dans la République du Honduras. Puis, le 28, au retour de Zelaya.
L’une des principales revendications du Front est satisfaite : il retrouve avec enthousiasme le dirigeant qui fédère son hétérogénéité – et se définit désormais comme un « libéral pro-socialiste ». Il s’agit d’une incontestable victoire. Pour s’en convaincre, il suffit d’observer les réactions de l’oligarchie traditionnelle et de l’ex-putschiste Micheletti, pas loin d’accuser Lobo de « trahison de la patrie ». Toutefois, la présence de « Mel » sur le territoire national n’est qu’un des quatre points sur lequel porte l’Accord de Cartagena : 1) le retour des exilés, dont l’ancien chef de l’Etat, avec garantie de leur sécurité ; 2) la reconnaissance du FNRP en tant que parti politique ; 3) la mise en place d’une Assemblée nationale constituante « participative et démocratique » ; 4) le démantèlement des structures golpistas et le châtiment des responsables.
Si les deux premiers points sont acquis, le président du Congrès, Juan Orlando Hernández, s’étant engagé à faire reconnaître le FNRP par décret [4], de forts doutes demeurent sur (point 3) les conditions dans lesquelles le pouvoir acceptera l’organisation de la Constituante et (point 4) sur une réorganisation « démocratique » des structures de l’Etat et la fin d’une répression qui se poursuit.
Dans ces conditions, on ne s’étonnera guère que les principaux dirigeants du Front (Berta Cáceres, Carlos Reyes, Juan Barahona, etc.), de très nombreuses organisations de base et militants, mais aussi le président équatorien Rafael Correa, estiment prématuré un retour du Honduras au sein de l’OEA (une Assemblée générale extraordinaire de cette dernière étant convoquée à Washington, le 1er juin, pour évoquer cette possibilité). La précipitation n’est pas de mise et rien n’empêche de tester la sincérité du gouvernement Lobo. Après tout, c’est bien la raison pour laquelle, à Cartagena, a été créée une Commission de vérification composée de la Colombie et, surtout, compte tenu de la confiance que les mouvements sociaux honduriens mettent en elle, de la République bolivarienne du Venezuela.
On trouvera un reportage sur la situation au Honduras – « Bras de fer entre pourvoir et Résistance au Honduras » – dans Le Monde diplomatique de juin.
« Sí, se pudo ! » (« Oui, on a pu ! ») C’est par cette formidable ovation qu’une foule enthousiaste a, le samedi 28 mai, à Tegucigalpa, accueilli l’avion de la compagnie vénézuélienne Conviasa dans lequel, en provenance de Managua (Nicaragua), rentrait au pays « son » président, Manuel Zelaya, renversé par un coup d’Etat le 28 juin 2009.
Lors de ce retour rendu possible par l’accord signé avec le chef de l’Etat hondurien en exercice, Porfirio Lobo, grâce à la médiation des présidents colombien Juan Manuel Santos et vénézuélien Hugo Chávez, le 22 mai, à Cartagena de las Indias (Colombie), « Mel » comme on l’appelle affectueusement dans son pays, était accompagné par une délégation très représentative de l’importance que l’Amérique latine accorde à l’événement.
Etaient en effet présents à ses côtés : les ministres des affaires étrangères vénézuélien et bolivien Nicolás Maduro et David Choquehuanca ; le représentant de la présidence de la République Dominicaine (où Zelaya a vécu exil pendant seize mois) Miguel Mejía ; l’ancien président panaméen Martín Torrijos ; l’ex-sénatrice colombienne Piedad Córdoba ; des représentants des partis politiques de gauche récemment réunis à Managua, dans le cadre du Forum de São Paulo ; des membres des Parlements andin et centraméricain ; le prêtre catholique salvadorien Andrés Tamayo, expulsé par le gouvernement du putschiste Roberto Micheletti, pour sa proximité avec les secteurs populaires honduriens. La veille, étaient arrivés le secrétaire général de l’Organisation des Etats américains (OEA) José Miguel Insulza et la ministre des affaires étrangères colombienne María Ángela Holguín.
Sur la place Isis Obed Murillo – rebaptisée du nom d’une jeune femme assassinée à cet endroit par l’armée, une semaine après le coup d’Etat –, face aux drapeaux rouges du Front national de résistance populaire (FNRP) et bleus de la République du Honduras, Zelaya a remercié ses sympathisants pour s’être « maintenus sur le pied de guerre » et avoir « travaillé sans repos pour son retour », avant de rendre hommage « à ceux qui sont tombés dans cette bataille, à ceux qui ont versé leur sang sur cette place », allusion directe à Isis Obed Murillo. « Ce sang n’a pas coulé en vain. » Deux années d’une lutte particulièrement difficile ont vraisemblablement, à cet instant, re-défilé dans plus d’un esprit enfiévré.
Ce matin du dimanche 28 juin 2009, 15 000 urnes avaient été installées dans les parcs des principales agglomérations honduriennes. Après la collecte de presque 500 000 signatures, dans le cadre de la loi de participation citoyenne, la question qui devait être soumise aux électeurs était la suivante : « Etes-vous d’accord pour que, lors des élections générales de novembre 2009, soit installée une quatrième urne pour décider de la convocation d’une Assemblée nationale constituante destinée à élaborer une nouvelle Constitution politique ? » Déjà présent dans le pays, le directeur des opérations électorales de l’Organisation des Etats américains (OEA), Raúl Alconada, avait déclaré : « Espérons que cette participation se déroulera de manière pacifique et que les groupes politiques qui s’y sont opposés sauront faire une lecture appropriée de ce que signifie une participation politique citoyenne. » De puissants intérêts voyant d’un très mauvais œil ces prémisses d’une démocratie plus « participative », son souhait ne sera pas entendu.
Il est cinq heures du matin quand, obéissant aux ordres du général Romeo Vásquez, chef de l’état-major conjoint des forces armées, des militaires pénètrent dans la résidence du président Manuel Zelaya et le maîtrisent brutalement. Deux heures plus tard, après une escale de 45 minutes sur la base militaire américaine de Palmerola (située en territoire hondurien), un avion le déposera, en pyjama, sur une piste de l’aéroport international Juan Santamaría, à San José, au Costa Rica.
Avec l’accord de la quasi-totalité des députés, le président du Congrès, Roberto Micheletti, caudillo grotesque et anachronique aux allures de mafieux italien, membre comme Zelaya du Parti libéral (PL), prête serment pour le remplacer. Tandis qu’est instauré un couvre-feu et que la répression se déchaîne contre les milliers de partisans du chef de l’Etat légitime descendus dans la rue, la « communauté internationale » – OEA, Organisation des Nations unies (ONU), Union européenne, Système d’intégration centraméricain (SICA), Groupe de Rio, Alliance bolivarienne des peuples d’Amérique (ALBA), Union des nations sud-américaines (Unasur) – condamne le golpe [1].
Le 3 juillet, la Cour suprême de justice (CSJ) rejette la demande du secrétaire général de l’OEA, José Miguel Insulza, dépêché en hâte à Tegucigalpa pour obtenir le retour au pouvoir du chef de l’Etat renversé (et non « déchu » comme l’ont rabâché tant de médias !). Le traître Micheletti annonce que Zelaya sera jugé pour… trahison ! s’il rentre au Honduras. Peine perdue… Le 5 juillet, ayant pris place à bord d’un avion vénézuélien, le président légitime tente de se poser sur l’aéroport Toncontín de Tegucigalpa. La veille, dans un message transmis obligatoirement par toutes les chaînes de télévision, le cardinal Óscar Rodríguez a tenté de l’en dissuader : son retour risque de provoquer un bain de sang. Voilà pour le goupillon. Le sabre, lui, dès les premières heures de la matinée, occupe les abords de l’aéroport pour réprimer les manifestations et place des camions militaires en travers des deux pistes pour empêcher l’atterrissage du président. Qui doit renoncer. Provisoirement.
Les pressions exercées pour calmer ses ardeurs ne manquent pas. Le 7 juillet, alors que les Etats-Unis tentent d’obtenir l’accord du « président intérimaire » ( !) pour que Zelaya puisse terminer les six mois de gouvernement qui lui restent, « avec des pouvoirs limités et clairement définis » – c’est-à-dire avec les attributions d’une potiche –, la secrétaire d’Etat Hillary Clinton lui recommande de faire tout son possible pour éviter une situation comme celle vécue le dimanche précédent, quand il a survolé le pays. Dix jours plus tard, le porte-parole du Département d’Etat, Robert Wood, revient à la charge : il exprime clairement l’opposition de Washington à une nouvelle tentative de retour, estimant qu’une telle initiative « mettrait en danger les efforts de médiation du président costaricien Oscar Arias ». En effet, consciente de l’influence déterminante des gouvernements progressistes siégeant au sein de l’OEA, Hillary Clinton a habilement manœuvré avec ses alliés pour ôter à cet organisme la gestion du cas hondurien et pour le déposer entre des mains amies.
Alors que les demandes de prudence de la « communauté internationale » – à l’exception des pays membres de l’ALBA – se multiplient, Zelaya surgit à Las Manos, à la frontière honduro-nicaraguayenne, le 24 juillet. L’armée hondurienne a décrété le couvre-feu dans quatre municipios frontaliers et interdit le passage aux centaines de manifestants venus l’appuyer. Si leur président entre brièvement sur le territoire national, il doit rebrousser chemin pour éviter d’être arrêté.
Le pouvoir croit avoir gagné la partie. Fin août, démarre la campagne électorale qui, le 29 novembre suivant, permettra de faire passer par profits et pertes la rupture de l’ordre constitutionnel. C’est compter sans l’opiniâtreté et le courage de Zelaya. Le 21 septembre, 86 jours après avoir été expulsé par la force des baïonnettes, celui qui représente la volonté du peuple rentre clandestinement à Tegucigalpa et trouve refuge à l’ambassade du Brésil. Quelque 4 000 de ses partisans qui passent la nuit devant la résidence sont très violemment délogés – deux morts et trente blessés – le lendemain à l’aube.
Pendant les semaines qui suivent, Zelaya et ceux qui l’accompagnent vont subir un véritable calvaire, entourés d’un fort dispositif militaire et policier, privés d’eau, de téléphone, d’électricité, inondés de gaz toxiques, soumis à une torture physique et psychologique par l’émission de sons de haute fréquence et, la nuit, par de puissantes illuminations de projecteurs. Avec l’appui clairement exprimé du président brésilien Luiz Inácio Lula da Silva, qui met en garde Micheletti contre toute intervention dans l’ambassade, les insurgés tiennent bon.
En insufflant de l’énergie à ses partisans, la présence de Zelaya dans son pays oblige le médiateur Óscar Arias à s’activer pour sortir la négociation des manœuvres dilatoires dans lesquelles, à dessein, elle s’embourbait. Le 30 octobre, les représentants du gouvernement légitime et de la dictature s’entendent sur le rétablissement de Zelaya dans ses fonctions avant le 5 novembre, et sur la nomination d’un gouvernement d’unité et de réconciliation. Dans les faits, et tandis que le Congrès retarde le vote permettant le retour du chef d’Etat constitutionnel, Micheletti s’offre un cabinet qu’il dirige lui-même et en écarte tout représentant zelayiste, au mépris de ses engagements. Le 5 novembre, Zelaya met un terme à l’imposture : « A compter de cette date, et quoi qu’il arrive, je n’accepterai aucun accord de retour à la présidence de la République permettant de couvrir ce coup d’Etat. »
En phase avec son leader, le Front national de résistance contre le coup d’Etat (FNRG) annonce, le 9 novembre, que le délai fixé à San José pour le retour du président légitime étant dépassé, il ne reconnaîtra pas les élections générales qui doivent avoir lieu vingt jours plus tard. Multipliant les provocations, le Congrès annonce qu’il se réunira le 2 décembre – soit trois jours après le scrutin ! – pour décider d’un éventuel rétablissement de Zelaya dans ses fonctions. Au jour dit, laissant éclater au grand jour à quel point la négociation de San José a été une farce, les députés la rejettent (111 voix contre, 14 pour). Cela n’empêche pas les Etats-Unis de faire savoir qu’ils reconnaîtront la validité de la consultation à venir.
Le 27 janvier 2010, élu pour le compte du Parti national (PN), et au terme d’un scrutin organisé par un gouvernement illégitime, Porfirio Lobo accède à la présidence, comme si rien ne s’était passé. Dans son uniforme de gala, le général Vásquez défile à son côté. Faisant partie des trois seuls chefs d’Etat qui assistent à l’investiture [2], le président dominicain Leonel Fernández emmène Zelaya dans son avion du retour, en tant qu’ « hôte invité » de son pays. Nommé député à vie, Micheletti bénéficie d’une amnistie politique.
Tous les golpistas s’auto-absolvent, se récompensant les uns les autres et s’offrant des postes importants (le général Vásquez reçoit la direction de l’Entreprise hondurienne de télécommunications Hondutel). Autre acteur majeur du pronunciamento, le général Miguel Angel García Padgett est nommé attaché militaire à l’ambassade hondurienne à Mexico. Egalement complices du coup d’Etat et du régime de facto, les membres de la Cour suprême de justice (CSJ), du Ministère public (MP) et du Tribunal suprême électoral (TSE) sont maintenus à leurs postes, au sein d’un prétendu gouvernement d’unité et de réconciliation nationale.
En revanche, des mandats d’arrêt sont lancés contre Zelaya « pour avoir dépensé de manière illégale 57 millions de lempiras [2 millions d’euros] en frais de publicité » pour la consultation prétendument illicite du 28 juin. S’il rentre, il sera immédiatement arrêté. Cette situation ne semble guère troubler le prix Nobel de la paix Barack Obama : « Les Etats-Unis gèrent l’économie, l’armée, les relations internationales et les combustibles, s’emporte Zelaya, depuis Saint- Domingue. Je ne comprends pas pourquoi ils permettent qu’on élise un président ; il vaudrait mieux qu’ils nomment un gouverneur [3] ! »
Pourtant, la situation ainsi créée ne signifie pas une défaite définitive des forces démocratiques. Pendant tous ces mois, le mouvement populaire s’est renforcé et le FNRG – dont la revendication initiale était le retour inconditionnel du président – se transforme en Front national de résistance populaire (FNRP), avec comme coordinateur « Mel » Zelaya. Au premier objectif, qui demeure intangible, il en ajoute un second : la convocation d’une Assemblée nationale constituante (ANC) pour refonder l’Etat. La très dure répression déclenchée par le pouvoir fera (au minimum) une centaine de morts, mais, jamais, ne parviendra à affaiblir la détermination du mouvement.
Confronté à la montée en puissance de cette Résistance – qui, lors de son Assemblée des 26 et 27 février 2011, a annoncé l’auto-convocation d’une ANC -, exclu de l’OEA, non reconnu par l’Argentine, la Bolivie, le Brésil, l’Equateur, le Nicaragua, le Paraguay et le Venezuela, en proie à une grave crise économique (car ne bénéficiant plus du pétrole bon marché de Caracas !), le gouvernement hondurien doit impérativement desserrer l’étau en « normalisant » la situation.
La demande la plus pressante (la seule, en réalité) de la « communauté internationale » est le retour de Zelaya. Mettant en fureur ses secteurs les plus droitiers, Lobo a commencé à préparer le terrain en promulguant le décret 005-2011 (14 février 2011) par lequel il autorise la procureure générale Ethel Deras Enamorado à « s’abstenir de présenter des recours légaux ou d’autres actions judiciaires dans les procès en matière pénale actuellement en cours contre le citoyen José Manuel Zelaya Rosales ». Ensuite, il exercera une pression non dissimulée sur la Cour suprême de justice pour qu’elle annule les « procès pour corruption » (inventés de toutes pièces !) intentés contre Zelaya – ce qui sera fait le 3 mai. La veille, José Miguel Insulza avait anticipé cette issue en rappelant que l’annulation des deux jugements « pourrait permettre le retour du Honduras au sein de l’OEA ».
Trois semaines auparavant, le 9 avril, et chacun poursuivant des objectifs à la fois communs et divergents, les présidents colombien (allié inconditionnel de Washington) et vénézuélien (chef de file de l’anti-impérialisme dans la région) avaient créé une forte surprise en faisant connaître leur rôle conjoint de médiateurs (approuvé par Zelaya), lors d’une rencontre au cours de laquelle les deux ennemis jurés Lobo et Chávez s’étaient serré la main.
C’est cette démarche, appuyée au Honduras par le FNRP et, entre autres, à l’extérieur, par la résolution finale du XVIIe Forum de São Paulo, qui, le 22 mai, a abouti à la signature entre Lobo et Zelaya de l’Accord dit de Cartagena : Accord pour la réconciliation nationale et la consolidation du système démocratique dans la République du Honduras. Puis, le 28, au retour de Zelaya.
L’une des principales revendications du Front est satisfaite : il retrouve avec enthousiasme le dirigeant qui fédère son hétérogénéité – et se définit désormais comme un « libéral pro-socialiste ». Il s’agit d’une incontestable victoire. Pour s’en convaincre, il suffit d’observer les réactions de l’oligarchie traditionnelle et de l’ex-putschiste Micheletti, pas loin d’accuser Lobo de « trahison de la patrie ». Toutefois, la présence de « Mel » sur le territoire national n’est qu’un des quatre points sur lequel porte l’Accord de Cartagena : 1) le retour des exilés, dont l’ancien chef de l’Etat, avec garantie de leur sécurité ; 2) la reconnaissance du FNRP en tant que parti politique ; 3) la mise en place d’une Assemblée nationale constituante « participative et démocratique » ; 4) le démantèlement des structures golpistas et le châtiment des responsables.
Si les deux premiers points sont acquis, le président du Congrès, Juan Orlando Hernández, s’étant engagé à faire reconnaître le FNRP par décret [4], de forts doutes demeurent sur (point 3) les conditions dans lesquelles le pouvoir acceptera l’organisation de la Constituante et (point 4) sur une réorganisation « démocratique » des structures de l’Etat et la fin d’une répression qui se poursuit.
Dans ces conditions, on ne s’étonnera guère que les principaux dirigeants du Front (Berta Cáceres, Carlos Reyes, Juan Barahona, etc.), de très nombreuses organisations de base et militants, mais aussi le président équatorien Rafael Correa, estiment prématuré un retour du Honduras au sein de l’OEA (une Assemblée générale extraordinaire de cette dernière étant convoquée à Washington, le 1er juin, pour évoquer cette possibilité). La précipitation n’est pas de mise et rien n’empêche de tester la sincérité du gouvernement Lobo. Après tout, c’est bien la raison pour laquelle, à Cartagena, a été créée une Commission de vérification composée de la Colombie et, surtout, compte tenu de la confiance que les mouvements sociaux honduriens mettent en elle, de la République bolivarienne du Venezuela.
On trouvera un reportage sur la situation au Honduras – « Bras de fer entre pourvoir et Résistance au Honduras » – dans Le Monde diplomatique de juin.
dimanche 1 mai 2011
La résistance hondurienne approuve la médiation de Chavez
Vendredi 29 avril 2011
Le "Front National de Résistance Populaire du Honduras" (FNRP) a approuvé aujourd'hui la médiation du président du Venezuela, Hugo Chávez, pour chercher une solution à la crise politique au Honduras.
La direction du FNRP a fait part lors dune conférence de presse d'un comuniqué dans lequel elle soutient les bons offices de Chávez, proposés lors de la rencontre avec le président de Colombie, Juan Manuel Santos, le 9 avril à Cartagena de Indias, pour que le Honduras retrouve l'ordre constitutionnel.
Nous manifestons notre pleine confiance au président de la République Bolivarienne du Venezuela, Hugo Rafael Chávez Frías, pour sa volonté de lutter en faveur de la démocratie déclare ce communiqué.
Le FNRP a exprimé son appui aux quatre points proposés pour la médiation :
- le retour des exilés, parmi lesquels le président Manuel Zelaya, chassé par le coup détat militaire 2009 et qui vit en république dominicaine ;
- la cessation des politiques répressives et le châtiment des responsables des violations des droits de l'homme, ce qui implique le démontage des structures putschistes ;
- le processus dinstallation d'une Assemblée Nationale Constituante
- la reconnaissance du FNRP comme organisation politique et force belligérante au Honduras.
Les dirigeants du FNRP ont remercié pour leur appui les présidents et les chanceliers des pays d'Amérique Latine, "en particulier de l'ALBA et de l'UNASUR, qui mantiennent leur refus de reconnaître le régime de facto hondurien jusquà ce que soit initié un processus réel de retour à l'ordre constitutionnel et qu'il soit mis fin aux violations des droits de l'homme.
Source : Cubadebate, http://www.cubadebate.cu/noticias/2
Le "Front National de Résistance Populaire du Honduras" (FNRP) a approuvé aujourd'hui la médiation du président du Venezuela, Hugo Chávez, pour chercher une solution à la crise politique au Honduras.
La direction du FNRP a fait part lors dune conférence de presse d'un comuniqué dans lequel elle soutient les bons offices de Chávez, proposés lors de la rencontre avec le président de Colombie, Juan Manuel Santos, le 9 avril à Cartagena de Indias, pour que le Honduras retrouve l'ordre constitutionnel.
Nous manifestons notre pleine confiance au président de la République Bolivarienne du Venezuela, Hugo Rafael Chávez Frías, pour sa volonté de lutter en faveur de la démocratie déclare ce communiqué.
Le FNRP a exprimé son appui aux quatre points proposés pour la médiation :
- le retour des exilés, parmi lesquels le président Manuel Zelaya, chassé par le coup détat militaire 2009 et qui vit en république dominicaine ;
- la cessation des politiques répressives et le châtiment des responsables des violations des droits de l'homme, ce qui implique le démontage des structures putschistes ;
- le processus dinstallation d'une Assemblée Nationale Constituante
- la reconnaissance du FNRP comme organisation politique et force belligérante au Honduras.
Les dirigeants du FNRP ont remercié pour leur appui les présidents et les chanceliers des pays d'Amérique Latine, "en particulier de l'ALBA et de l'UNASUR, qui mantiennent leur refus de reconnaître le régime de facto hondurien jusquà ce que soit initié un processus réel de retour à l'ordre constitutionnel et qu'il soit mis fin aux violations des droits de l'homme.
Source : Cubadebate, http://www.cubadebate.cu/noticias/2
lundi 4 avril 2011
Honduras: geen normalisatie, wel repressie
Onder de regering van huidig president Porfirio Lobo werden tien journalisten vermoord, ongeveer 50 holebi's werden het slachtoffers van gewelddaden, en meer dan 30 boeren verloren het leven. Vooral in de regio Bajo Aguan woedt een hevige strijd om land tegen grootgrondbezitter Miguel Facusse, een van de putschisten van juni 2009. Maar ook het sociale verzet neemt toe.
Sociale protesten
Sinds twee weken komen de onderwijsvakbonden massaal op straat tegen de privatiseringsplannen van de regering-Lobo en om hogere lonen te eisen en een einde aan de stijging van de brandstofprijzen.
De politie en de staatsveiligheid gebruiken steeds meer repressieve technieken om het sociaal protest te breken. Zo werden bijvoorbeeld de transportmiddelen van de onderwijsvakbond in beslag genomen, wat hun mobilisatiekracht verminderde.
Leraars werden op een willekeurige manier ontslagen. In ijltempo keurde de regering noodwetten goed die het recht op betogen en staken moeten inperken. Colleges en scholen in Tegucigalpa worden onophoudelijk bestookt met traangasbommen.
De onafhankelijke media worden in hun werk belemmerd. Kanaal 36 werd - net zoals tijdens de staatsgreep van Micheletti - opnieuw het mikpunt van aanvallen van de oproerpolitie. Verschillende journalisten moesten na afloop van hun verslaggeving over de lerarenstaking worden opgenomen in ziekenhuizen met verwondingen die ze opliepen door de repressieve aanpak door de politie.
Op 18 maart verloor Ilse Ivania Velásquez Rodríguez het leven. Zij werd geraakt door een traangasbom, viel flauw en werd overreden door een auto die uit het tumult trachtte weg te geraken. Ivania was de zuster van Manfredo Velásquez, één van de studentenleiders die in de jaren tachtig werd opgepakt en verdween. Zijn zaak werd aanhangig gemaakt door mensenrechtenorganisatie Cofadeh bij CIDH, de Inter-Amerikaanse Commissie voor Mensenrechten. De Hondurese overheid werd eind jaren negentig verantwoordelijk gesteld en veroordeeld voor zijn gedwongen verdwijning.
COFADEH in de bres voor mensenrechten
Bertha Oliva, coördinatrice van Cofadeh, werd vorige week in Washington uitgenodigd om voor CIDH te komen getuigen over de huidige mensenrechtensituatie in Honduras. Tijdens de hoorzitting zei Oliva dat politieagenten en militairen het werk van mensenrechtenverdedigers op alle mogelijke manieren belemmeren. Ze sprak ook over de constante bedreigingen die ze op verschillende manieren ontvangen.
Eén voorbeeld: de vroegere commissaris voor de Mensenrechten, Leo Valladares, moest noodgedwongen het land verlaten nadat hij en zijn familie maanden werden gevolgd en bespied door personen die rondreden in een geblindeerde wagen. De politie heeft nooit iets ondernomen.
Bertha Oliva besloot haar getuigenis met nogmaals aan te tonen dat de Hondurese bevolking zich ook nu nog in een absolute staat van gebrek aan bescherming bevindt. Straffeloosheid is het belangrijkste wapen van de staat. CIDH maakte zelf duidelijk niet opgezet te zijn met de zwakke verdediging van de Hondurese overheid tegenover deze gedocumenteerde klachten van de mensenrechtenbeweging. Ze wees op de vele contradicties die de overheid naar voren schuift.
Na terugkeer uit Washington verklaarde Bertha Oliva tijdens een persconferentie: "Una vez más quedó al descubierto la complicidad de las instituciones con los delitos que se han venido cometiendo a partir del golpe de Estado y el recrudecimiento de las violaciones a los derechos Humanos".
In de volgende maanden zal CIDH een uitspraak doen over de besproken thema's tijdens de hoorzitting. Een belangrijke zaak betreft het willekeurige ontslag van verschillende onafhankelijke rechters die hadden verklaard dat wat er in Honduras is gebeurd in juni 2009 wel degelijk een staatsgreep was.
Algemene vergadering van het volksverzet FNRP en de rol van de vakbonden
Vorming en mobilisatie blijven de belangrijkste doelstellingen van het verzet. Het volksverzet analyseerde tijdens haar algemene vergadering van 26 en 27 februari de voorwaarden om eventueel aan verkiezingen deel te nemen. Die blijken niet te zijn vervuld. Prioritair blijft de ontmanteling van de oligarchie en het samenbrengen van alle krachten die nodig zijn om een grondwetgevende vergadering (asamblea consitutyente) te organiseren.
Dit zijn de voorwaarden waaraan volgens het FNRP moet worden voldaan:
1. de veilige en onvoorwaardelijke terugkeer van de algemene coördinator van het FNRP, Manuel Zelaya, en honderden andere politieke bannelingen;
2. een hervorming van de kieswet;
3. een hervorming van het hooggerechtshof dat verantwoordelijk draagt bij de organisatie van de verkiezingen (Tribunal Suprema Electoral);
4. een nationale en internationale erkenning van het FNRP als politieke macht;
5. het FNRP wil haar meer dan 25.000 lokale structuren beter organiseren. Dat vraagt meer politieke training. Een operationeel politiek orgaan is nodig om een tegengewicht te vormen tegenover de perfect afgestemde machinerie van rechts.
Volgens een internationale waarnemer van de PSOL (Brazilië) kon de algemene vergadering van het FNRP van eind februari omschreven worden als de eerste in haar soort. In de geschiedenis van de sociale bewegingen heeft ze een belangrijke weerklank in heel Latijns-Amerika. Dit niet alleen vanwege haar representativiteit -meer dan 1.500 afgevaardigden vanuit 18 departementen namen er aan deel - of vanwege haar democratische interne besluitvorming, maar vooral vanwege de massale mobilisatie van haar leden.
Ook de Hondurese vakbonden gebruiken hun internationale contacten om de solidariteit levend te houden en uit te bouwen. Zo bezoekt Carlos H. Reyes, secretaris van Stibys, Genève. Hij werd uitgenodigd door de UITA (Wereldvakverbond voor de voedselindustrie) om een stand van zaken te geven.
Op 29 maart had hij contact met de Hoge Commissaris voor Mensenrechten van de VN. Bij de Internationale Arbeidsorganisatie (IAO) ging hij langs om er het laatste rapport voor te stellen over schendingen van arbeids- en mensenrechten in Honduras.
Poging om onderwijsverzet te breken
In een poging om het verzet van de onderwijsvakbond te breken, heeft de Hondurese regering een decreet uitgevaardigd dat bepaalt dat leerkrachten die op 28 maart niet komen opdagen om les te geven twee maanden loonverlies zullen leiden. Wie niet komt op woensdag 30 maart, de dag van de nationale burgerstaking van het FNRP, zal 6 maanden loonverlies lijden en wie geen lesgeeft op maandag 4 april verliest gewoonweg zijn job. De nationale burgerstaking van 30 maart was bedoeld als een voorloper voor de algemene staking.
Het Parlacen (Centraal-Amerikaans Parlement) zou deze week Porfirio Lobo huldigen voor zijn 'verzoenende rol' die hij speelde in Honduras. Vanwege de repressie tegenover het sociale protest is daar voorlopig van afgezien. Een volgende plenaire vergadering zal de motie echter opnieuw behandelen met als bedoeling de erkenning van het huidige regime in Honduras.
In de maand juni vindt ook de Algemene Vergadering van de Organisatie van Amerikaanse Staten plaats in San Salvador. Daar zal worden geprobeerd om Honduras weer te laten opnemen in de organisatie. Daartoe is al een lobbycampagne opgestart door rechts. Aan de linkerzijde blijft Unasur nog steeds gekant tegen een eventuele heropname van Honduras.
Het FNRP heeft een grote informatiecampagne opgezet om de mensen te informeren wat er allemaal op het spel staat, ook op internationaal vlak. Het FNRP zal Honduras vertegenwoordigen op het volgende Wereld Sociaal Forum in São Paolo. Ook de internationale vakbondssolidariteit kan wereldwijd het verschil maken door Hondurese basisorganisaties te blijven ondersteunen en ruchtbaarheid te geven aan de acties van de onderwijsvakbonden.
Ellen Verryt
Ellen Verryt is regionaal verantwoordelijke voor Latijns-Amerika bij de NGO Wereldsolidariteit.
Sociale protesten
Sinds twee weken komen de onderwijsvakbonden massaal op straat tegen de privatiseringsplannen van de regering-Lobo en om hogere lonen te eisen en een einde aan de stijging van de brandstofprijzen.
De politie en de staatsveiligheid gebruiken steeds meer repressieve technieken om het sociaal protest te breken. Zo werden bijvoorbeeld de transportmiddelen van de onderwijsvakbond in beslag genomen, wat hun mobilisatiekracht verminderde.
Leraars werden op een willekeurige manier ontslagen. In ijltempo keurde de regering noodwetten goed die het recht op betogen en staken moeten inperken. Colleges en scholen in Tegucigalpa worden onophoudelijk bestookt met traangasbommen.
De onafhankelijke media worden in hun werk belemmerd. Kanaal 36 werd - net zoals tijdens de staatsgreep van Micheletti - opnieuw het mikpunt van aanvallen van de oproerpolitie. Verschillende journalisten moesten na afloop van hun verslaggeving over de lerarenstaking worden opgenomen in ziekenhuizen met verwondingen die ze opliepen door de repressieve aanpak door de politie.
Op 18 maart verloor Ilse Ivania Velásquez Rodríguez het leven. Zij werd geraakt door een traangasbom, viel flauw en werd overreden door een auto die uit het tumult trachtte weg te geraken. Ivania was de zuster van Manfredo Velásquez, één van de studentenleiders die in de jaren tachtig werd opgepakt en verdween. Zijn zaak werd aanhangig gemaakt door mensenrechtenorganisatie Cofadeh bij CIDH, de Inter-Amerikaanse Commissie voor Mensenrechten. De Hondurese overheid werd eind jaren negentig verantwoordelijk gesteld en veroordeeld voor zijn gedwongen verdwijning.
COFADEH in de bres voor mensenrechten
Bertha Oliva, coördinatrice van Cofadeh, werd vorige week in Washington uitgenodigd om voor CIDH te komen getuigen over de huidige mensenrechtensituatie in Honduras. Tijdens de hoorzitting zei Oliva dat politieagenten en militairen het werk van mensenrechtenverdedigers op alle mogelijke manieren belemmeren. Ze sprak ook over de constante bedreigingen die ze op verschillende manieren ontvangen.
Eén voorbeeld: de vroegere commissaris voor de Mensenrechten, Leo Valladares, moest noodgedwongen het land verlaten nadat hij en zijn familie maanden werden gevolgd en bespied door personen die rondreden in een geblindeerde wagen. De politie heeft nooit iets ondernomen.
Bertha Oliva besloot haar getuigenis met nogmaals aan te tonen dat de Hondurese bevolking zich ook nu nog in een absolute staat van gebrek aan bescherming bevindt. Straffeloosheid is het belangrijkste wapen van de staat. CIDH maakte zelf duidelijk niet opgezet te zijn met de zwakke verdediging van de Hondurese overheid tegenover deze gedocumenteerde klachten van de mensenrechtenbeweging. Ze wees op de vele contradicties die de overheid naar voren schuift.
Na terugkeer uit Washington verklaarde Bertha Oliva tijdens een persconferentie: "Una vez más quedó al descubierto la complicidad de las instituciones con los delitos que se han venido cometiendo a partir del golpe de Estado y el recrudecimiento de las violaciones a los derechos Humanos".
In de volgende maanden zal CIDH een uitspraak doen over de besproken thema's tijdens de hoorzitting. Een belangrijke zaak betreft het willekeurige ontslag van verschillende onafhankelijke rechters die hadden verklaard dat wat er in Honduras is gebeurd in juni 2009 wel degelijk een staatsgreep was.
Algemene vergadering van het volksverzet FNRP en de rol van de vakbonden
Vorming en mobilisatie blijven de belangrijkste doelstellingen van het verzet. Het volksverzet analyseerde tijdens haar algemene vergadering van 26 en 27 februari de voorwaarden om eventueel aan verkiezingen deel te nemen. Die blijken niet te zijn vervuld. Prioritair blijft de ontmanteling van de oligarchie en het samenbrengen van alle krachten die nodig zijn om een grondwetgevende vergadering (asamblea consitutyente) te organiseren.
Dit zijn de voorwaarden waaraan volgens het FNRP moet worden voldaan:
1. de veilige en onvoorwaardelijke terugkeer van de algemene coördinator van het FNRP, Manuel Zelaya, en honderden andere politieke bannelingen;
2. een hervorming van de kieswet;
3. een hervorming van het hooggerechtshof dat verantwoordelijk draagt bij de organisatie van de verkiezingen (Tribunal Suprema Electoral);
4. een nationale en internationale erkenning van het FNRP als politieke macht;
5. het FNRP wil haar meer dan 25.000 lokale structuren beter organiseren. Dat vraagt meer politieke training. Een operationeel politiek orgaan is nodig om een tegengewicht te vormen tegenover de perfect afgestemde machinerie van rechts.
Volgens een internationale waarnemer van de PSOL (Brazilië) kon de algemene vergadering van het FNRP van eind februari omschreven worden als de eerste in haar soort. In de geschiedenis van de sociale bewegingen heeft ze een belangrijke weerklank in heel Latijns-Amerika. Dit niet alleen vanwege haar representativiteit -meer dan 1.500 afgevaardigden vanuit 18 departementen namen er aan deel - of vanwege haar democratische interne besluitvorming, maar vooral vanwege de massale mobilisatie van haar leden.
Ook de Hondurese vakbonden gebruiken hun internationale contacten om de solidariteit levend te houden en uit te bouwen. Zo bezoekt Carlos H. Reyes, secretaris van Stibys, Genève. Hij werd uitgenodigd door de UITA (Wereldvakverbond voor de voedselindustrie) om een stand van zaken te geven.
Op 29 maart had hij contact met de Hoge Commissaris voor Mensenrechten van de VN. Bij de Internationale Arbeidsorganisatie (IAO) ging hij langs om er het laatste rapport voor te stellen over schendingen van arbeids- en mensenrechten in Honduras.
Poging om onderwijsverzet te breken
In een poging om het verzet van de onderwijsvakbond te breken, heeft de Hondurese regering een decreet uitgevaardigd dat bepaalt dat leerkrachten die op 28 maart niet komen opdagen om les te geven twee maanden loonverlies zullen leiden. Wie niet komt op woensdag 30 maart, de dag van de nationale burgerstaking van het FNRP, zal 6 maanden loonverlies lijden en wie geen lesgeeft op maandag 4 april verliest gewoonweg zijn job. De nationale burgerstaking van 30 maart was bedoeld als een voorloper voor de algemene staking.
Het Parlacen (Centraal-Amerikaans Parlement) zou deze week Porfirio Lobo huldigen voor zijn 'verzoenende rol' die hij speelde in Honduras. Vanwege de repressie tegenover het sociale protest is daar voorlopig van afgezien. Een volgende plenaire vergadering zal de motie echter opnieuw behandelen met als bedoeling de erkenning van het huidige regime in Honduras.
In de maand juni vindt ook de Algemene Vergadering van de Organisatie van Amerikaanse Staten plaats in San Salvador. Daar zal worden geprobeerd om Honduras weer te laten opnemen in de organisatie. Daartoe is al een lobbycampagne opgestart door rechts. Aan de linkerzijde blijft Unasur nog steeds gekant tegen een eventuele heropname van Honduras.
Het FNRP heeft een grote informatiecampagne opgezet om de mensen te informeren wat er allemaal op het spel staat, ook op internationaal vlak. Het FNRP zal Honduras vertegenwoordigen op het volgende Wereld Sociaal Forum in São Paolo. Ook de internationale vakbondssolidariteit kan wereldwijd het verschil maken door Hondurese basisorganisaties te blijven ondersteunen en ruchtbaarheid te geven aan de acties van de onderwijsvakbonden.
Ellen Verryt
Ellen Verryt is regionaal verantwoordelijke voor Latijns-Amerika bij de NGO Wereldsolidariteit.
mardi 29 mars 2011
Infos du Honduras - La repression continue - Appel à la solidarité
Nous lançons un appel à la solidarité avec la lutte du peuple hondurien qui vit actuellement, et depuis le coup d'état de juin 2009, une situation de violence systématique et institutionnalisée et d'une augmentation de violations des droits humains.
Depuis le jeudi 17 mars, plusieurs manifestations accompagnées par le Front national de résistance populaire -en solidarité avec le mouvement des enseignants et de la défense de l'éducation publique-, ont été réprimées par la police nationale et les forces armées avec un usage excessif de la force. Ce nouvel épisode de répression n'est que la continuité de la violence institutionnalisée d'un gouvernement qui n'a fait qu'assurer la continuité des violations des droits humains.
Les manifestations pacifiques -intégrées par des enseignants, des étudiants, des jeunes, des parents et des mères, ainsi que par les secteurs organisés-, ont été réprimées avec des quantités excessives de gaz lacrymogènes dans un évident mépris des procédures autorisées pour la dissolution de protestations. Les capsules de gaz sont utilisées comme des projectiles, jetées directement sur les manifestants et dans des espaces confinés. L'utilisation de canons à l'eau colorée est aussi constatée. Depuis le coup d'état, plusieurs personnes ont été des victimes fatales de cette tactique.
Le 24 mars, les organes de répression sont entrées à l'Université nationale autonome du Honduras, en violation flagrante du principe d'autonomie universitaire. Pendant environ six heures, la police s'est affrontée avec ses étudiants et étudiantes, armées de pierres, et a jetée plus de 100 capsules de gaz lacrymogène sur le site du campus universitaire, affectant de nombreux étudiants, employés et professeurs. Le lendemain, la répression a été encore plus violente, avec une «pluie» de gaz lacrymogène s'étalant sur l'espace de quelques pâtés de maisons. Plusieurs personnes se sont vues affectées par les gaz et les coups. La police à fait la chasse aux manifestants, et a capturé beaucoup d'entre eux.
Pour tout ceci, nous demandons à la communauté internationale de mener des actions de solidarité et exiger le cesse de la répression et le respect du droit d'association libre expression et protestation démocratique.
Depuis le jeudi 17 mars, plusieurs manifestations accompagnées par le Front national de résistance populaire -en solidarité avec le mouvement des enseignants et de la défense de l'éducation publique-, ont été réprimées par la police nationale et les forces armées avec un usage excessif de la force. Ce nouvel épisode de répression n'est que la continuité de la violence institutionnalisée d'un gouvernement qui n'a fait qu'assurer la continuité des violations des droits humains.
Les manifestations pacifiques -intégrées par des enseignants, des étudiants, des jeunes, des parents et des mères, ainsi que par les secteurs organisés-, ont été réprimées avec des quantités excessives de gaz lacrymogènes dans un évident mépris des procédures autorisées pour la dissolution de protestations. Les capsules de gaz sont utilisées comme des projectiles, jetées directement sur les manifestants et dans des espaces confinés. L'utilisation de canons à l'eau colorée est aussi constatée. Depuis le coup d'état, plusieurs personnes ont été des victimes fatales de cette tactique.
Le 24 mars, les organes de répression sont entrées à l'Université nationale autonome du Honduras, en violation flagrante du principe d'autonomie universitaire. Pendant environ six heures, la police s'est affrontée avec ses étudiants et étudiantes, armées de pierres, et a jetée plus de 100 capsules de gaz lacrymogène sur le site du campus universitaire, affectant de nombreux étudiants, employés et professeurs. Le lendemain, la répression a été encore plus violente, avec une «pluie» de gaz lacrymogène s'étalant sur l'espace de quelques pâtés de maisons. Plusieurs personnes se sont vues affectées par les gaz et les coups. La police à fait la chasse aux manifestants, et a capturé beaucoup d'entre eux.
Pour tout ceci, nous demandons à la communauté internationale de mener des actions de solidarité et exiger le cesse de la répression et le respect du droit d'association libre expression et protestation démocratique.
jeudi 10 mars 2011
La Resistance du Honduras consolidée après la grande Assemblée Nationale
27 Février, 2011.
Pendant deux jours, la première assemblée générale de base populaire a eu lieu avec une représentation de plus de 1500 délégués provenant de toutes les municipalités et plus de 300 organisations qui composent le Front National de Résistance Populaire au Honduras.
Félix Molina a ouvert son programme de radio dominical en disant "…iont perdu ceux qui ont utilisé les vieilles techniques d'intimidation parce qu'ils ont été victimes d´elles-mêmes."
L'assemblée a décidé presque à l'unanimité de ne pas participer aux processus électoraux, rester comme un front ample politique et a ratifié José Manuel Zelaya et Juan Barahona en tant que coordinateur et coordinateur adjoint.
Le FNRP a consolidé son identité comme front national en lutte politique et comme front ample dans sa diversité et l’abandon de sa conversion en parti politique ou front électoral.
Pour sa part, Carlos H. Reyes a déclaré que "c'était une réunion sans précédent au Honduras, un exemple de débat et de résolution des problèmes en acceptant le fait que la discussion doit continuer; cette Assemblée n'était ni le début ni la fin." Quant à l'unité qui a été utilisée comme mot d'ordre de l’Assemblée, Reyes a déclaré: "après cette Assemblée nous sommes plus unis dans notre diversité ... (...) ... nous étions préoccupés par ce qui pouvait arriver, mais ça a été un grand succès et le FNRP en est sorti plus fort" .
En outre, l'un des aspects plus importants a été la décision d'initier un processus d'auto convocation pour une Assemblée Nationale Constituante du 28 juin de cette année. En ce sens, Félix Molina a nommé un certain nombre d'organisations qui ont travaillé sur des propositions constitutionnelles. "Il faut travailler à partir de maintenant sur les contenus de la nouvelle Constitution", a déclaré Molina en assurant que le Mouvement Ample pour la Dignité et la Justice, La Red COMAL, le diocèse d’Occident et les mouvements des peuples originaires et noirs du Honduras ont déjà travaillé à des propositions concrètes.
D’autre part, l'ex-première dame Xiomara Castro a assisté a l'événement politique en tant que déléguée,eti a à son tour demandé au gouvernement des Etats Unis de ne pas interférer dans la détermination du peuple hondurien de décider de son présent, son avenir et son mode de vie.
Plusieurs personnes ont fait remarquer qu’un problème d'identité a été résolu. Il régnait une grande unanimité et le constat a été fait que ce n'est qu'ensemble qu’ils parviendront à une Assemblée Nationale Constituante, à assurer le retour des personnes en exil et au démantèlement du régime.
L'événement a été certainement historique et significatif. Mais il a également été un espace de discussion politique et le symbole du début de l'émancipation d'un peuple en résistance.
Texte tiré du site de Front national de Résistance populaire.
www.resistenciahonduras.net
Pendant deux jours, la première assemblée générale de base populaire a eu lieu avec une représentation de plus de 1500 délégués provenant de toutes les municipalités et plus de 300 organisations qui composent le Front National de Résistance Populaire au Honduras.
Félix Molina a ouvert son programme de radio dominical en disant "…iont perdu ceux qui ont utilisé les vieilles techniques d'intimidation parce qu'ils ont été victimes d´elles-mêmes."
L'assemblée a décidé presque à l'unanimité de ne pas participer aux processus électoraux, rester comme un front ample politique et a ratifié José Manuel Zelaya et Juan Barahona en tant que coordinateur et coordinateur adjoint.
Le FNRP a consolidé son identité comme front national en lutte politique et comme front ample dans sa diversité et l’abandon de sa conversion en parti politique ou front électoral.
Pour sa part, Carlos H. Reyes a déclaré que "c'était une réunion sans précédent au Honduras, un exemple de débat et de résolution des problèmes en acceptant le fait que la discussion doit continuer; cette Assemblée n'était ni le début ni la fin." Quant à l'unité qui a été utilisée comme mot d'ordre de l’Assemblée, Reyes a déclaré: "après cette Assemblée nous sommes plus unis dans notre diversité ... (...) ... nous étions préoccupés par ce qui pouvait arriver, mais ça a été un grand succès et le FNRP en est sorti plus fort" .
En outre, l'un des aspects plus importants a été la décision d'initier un processus d'auto convocation pour une Assemblée Nationale Constituante du 28 juin de cette année. En ce sens, Félix Molina a nommé un certain nombre d'organisations qui ont travaillé sur des propositions constitutionnelles. "Il faut travailler à partir de maintenant sur les contenus de la nouvelle Constitution", a déclaré Molina en assurant que le Mouvement Ample pour la Dignité et la Justice, La Red COMAL, le diocèse d’Occident et les mouvements des peuples originaires et noirs du Honduras ont déjà travaillé à des propositions concrètes.
D’autre part, l'ex-première dame Xiomara Castro a assisté a l'événement politique en tant que déléguée,eti a à son tour demandé au gouvernement des Etats Unis de ne pas interférer dans la détermination du peuple hondurien de décider de son présent, son avenir et son mode de vie.
Plusieurs personnes ont fait remarquer qu’un problème d'identité a été résolu. Il régnait une grande unanimité et le constat a été fait que ce n'est qu'ensemble qu’ils parviendront à une Assemblée Nationale Constituante, à assurer le retour des personnes en exil et au démantèlement du régime.
L'événement a été certainement historique et significatif. Mais il a également été un espace de discussion politique et le symbole du début de l'émancipation d'un peuple en résistance.
Texte tiré du site de Front national de Résistance populaire.
www.resistenciahonduras.net
mardi 1 mars 2011
Manuel zelaya : lettre a l'assemblee du Front national de Résistance populaire du 26 fevrier
Cher(e)s camarades,
Délégué(e)s à l'Assemblée Nationale,
Front National de Résistance Populaire,
Peuple hondurien en Résistance,
A quelques heures du début de l'événement le plus important de l'histoire poltique du Honduras, depuis la formation des partis politiques traditionnels, nous appelons tous les membres du FNRP à impulser un mouvement de libération nationale basé sur des principes et des idées révolutionnaires, pro socialistes, pour construire une nouvelle société.
Il est important de savoir que ma présence physique demeure entravée par les plans stratégiques d'expansion de l'empire, ceux-là même qui ont ordonné ma sortie brutale de l'administration de l'Etat, utilisant ces traitres de la patrie qui, ces cinquante dernières années, ont gouverné sans respect, sans éthique ni morale.
Chaque jour qui passe, et même si nous entrons dans des zones de turbulence, nous devons avoir confiance dans le fait que la résistance continue de consolider la conscience nationale, qui s'appuie sur l'unité, le savoir, les idées et la construction de la pensée populaire ; voilà les armes qui unissent cette assemblée du peuple qui se libère.
Depuis sa création, le front est une organisation politique, par définition, démocratique incluante et libre, cela doit être réaffirmé ; en évitant la "terrible" possibilité qu'elle devienne lors de cette assemblée un "nouveau" parti traditionnel et que cette discussion nous amène à agir exactement comme l'un d'entre-eux.
Nous ne devons pas répéter l'histoire des vieux partis "émergents", qui ont assumé les pratiques vicieuses des partis traditionnels, et qui ont fini par agir de pire façon encore. Il pourrait arriver la même chose si nous acceptions de façon irréfléchie le postulat de bonne foi qui consiste à entrer maintenant dans la sphère électorale.
Je ne considère pas cette position comme étrange, car en tant que société, nous tendons à reproduire les patrons qui constituent la classe dominante ; ce qu'il y a de compliqué dans cet objectif c'est de construire un nouveau processus.
Les processus électoraux de n'importe quelle société latino-américaine sont virtuellement inévitables pour les peuples en voie de libération ; Nous ne sommes pas une exception, mais cela ne doit pas être considéré comme une obligation, mais comme une mission de plus. Il est clair qu'en ce moment, notre participation aux élections aurait des effets plus destructeurs que positifs ; Les conditions ne sont pas réunies et le contrôle des putschistes sur tous les organismes d'application de la justice, ne rendent pas, pour l'instant, cette possibilité viable. Néanmoins, la réalité est dynamique et la conjoncture peut changer, celle-ci nous oblige parfois, de manière soudaine, à prendre des décisions transcendentales. Le fait que nous ne soyons pas prêts ne veut pas dire nous devions rester immobiles, au contraire, cela nous oblige à mener notre lutte à plusieurs niveaux de l'action organisée pour exiger que les conditions soient celles dont nous avons besoin.
Le Front National de Résistance Populaire en tant qu'entité politique doit continuer l'important travail d'organisation, de formation et de mobilisation dans toutes les unités géographiques du pays, depuis le hameau jusqu'au niveau national. Nous avons besoin d'envirion 25 milles directives pour être prêts : Aucun changement n'est possible si le peuple n'est pas prêt.
Il faut savoir qu'au sein du front, il y a des hommes et des femmes bien décidés à lutter contre tout et à tout risquer, ne gâchons pas l'opportunité qui nous est donnée en créant maintenant des compétitions stériles entre nous.
La marche implacable du néo-libéralisme dans notre pays, les violations des droits humains, la mutilation des conquêtes sociales des enseignants, des ouvriers, des paysans et des indigènes, nous démontrent qu'en la matière nous avons régressé de plusieurs années, en particulier avec la réapparition de pratiques du crime politique qui remontent aux années 80'. Nous ne pouvons espérer que quelqu'un d' autre fera la justice pour nous. Nous devons exiger immédiatement le démantèlement de tout l'appareil qui couvre les groupes paramilitaires et le système d'administration de la justice, non seulement pour sa complicité dans le coup d'Etat mais aussi pour son attitude complaisante envers les bourreaux du peuple. Nous n' y arriverons qu'avec l'action permanente de la pression populaire.
Nous devons dénoncer les groupes qui agissent comme des chiens assoiffés de sang et dont le désir de torturer est insatiable, autant que l'injustice et l'isolement dans lesquels nous sommes, nous devons les dénoncer de façon quotidienne, sur les plans national et international, nous ne pouvons laisser cette charge immense à un groupe de défenseurs de droits humains qui ont chaque jour plus de travail, à cause de l'impunité dans laquelle agissent les assassins. Nous défendre est du devoir de tous et défier le système de justice qui nous opprime est une manière légitime de nous protéger.
la mission consiste à nous renforcer et à ouvrir autant de fronts de lutte pour nos revendications qu'il sera possible, sans trêve, de la même façon qu'ils sont implacables, nous devons démontrer que nous sommes invincibles.
L'auto-convocation de la constituante est une proposition que nous formulons depuis le mois d'août 2010, et nous devons nous y tenir jusqu'à l'élaboration de la nouvelle constitution où apparaissent nos droits souverains.
Il est impératif de demander que les figures du référendum et du plebiscite deviennent transparents dans les plus brefs délais, ainsi, nous mobilisons le peuple, nous l'organisons et nous prenons l'ennemi à son propre piège.
Nous voulons une société libre qui restecte le droit à la propriété mais que ce droit particulier ne soit pas au dessus du droit collectif. Nous voulons que les citoyens soient au dessus du marché et que le bien-être commun soit le but de la société. Le Honduras n'est pas une propriété privée, inscrite sur le registre du marché au nom de quelques familles qui se croient propriétaires du patrimoine national.
Ceux qui sentent que cette lutte ne répond pas à leurs attentes devraient considérer sérieusement la possibilité qu'ils se trompent.
Compatriotes, ce n'est pas non plus en nous croyant plus révolutionnaires que d'autres que nous construisons le nouveau Honduras, c'est en reconnaissant le révolutionnaire qu'il y a en chaque résident, ceux des différentes forces politiques -libéraux UD- que nous intégrons au front.
Exiger la restauration de l'Etat démocratique, la fin de l'impunité pour les crimes de lèse humanité et la convocation d'une large Assemblée Nationale Constituante, incluante, juste, souveraine et originaire est une mission que nous devons mener à bien.
Depuis presque deux ans que nous avons été expulsés violemment de notre terre, avec des centaines de compatriotes, nous croyons que cette assemblée est un acte d'espoir pour la refondation du Honduras, et qu'elle remplira sa mission d'abonder en positions d'unité et en pratiques démocratiques.
Nous résistons et nous vaincrons
Resistimos y venceremos.
José Manuel Zelaya Rosales
Délégué(e)s à l'Assemblée Nationale,
Front National de Résistance Populaire,
Peuple hondurien en Résistance,
A quelques heures du début de l'événement le plus important de l'histoire poltique du Honduras, depuis la formation des partis politiques traditionnels, nous appelons tous les membres du FNRP à impulser un mouvement de libération nationale basé sur des principes et des idées révolutionnaires, pro socialistes, pour construire une nouvelle société.
Il est important de savoir que ma présence physique demeure entravée par les plans stratégiques d'expansion de l'empire, ceux-là même qui ont ordonné ma sortie brutale de l'administration de l'Etat, utilisant ces traitres de la patrie qui, ces cinquante dernières années, ont gouverné sans respect, sans éthique ni morale.
Chaque jour qui passe, et même si nous entrons dans des zones de turbulence, nous devons avoir confiance dans le fait que la résistance continue de consolider la conscience nationale, qui s'appuie sur l'unité, le savoir, les idées et la construction de la pensée populaire ; voilà les armes qui unissent cette assemblée du peuple qui se libère.
Depuis sa création, le front est une organisation politique, par définition, démocratique incluante et libre, cela doit être réaffirmé ; en évitant la "terrible" possibilité qu'elle devienne lors de cette assemblée un "nouveau" parti traditionnel et que cette discussion nous amène à agir exactement comme l'un d'entre-eux.
Nous ne devons pas répéter l'histoire des vieux partis "émergents", qui ont assumé les pratiques vicieuses des partis traditionnels, et qui ont fini par agir de pire façon encore. Il pourrait arriver la même chose si nous acceptions de façon irréfléchie le postulat de bonne foi qui consiste à entrer maintenant dans la sphère électorale.
Je ne considère pas cette position comme étrange, car en tant que société, nous tendons à reproduire les patrons qui constituent la classe dominante ; ce qu'il y a de compliqué dans cet objectif c'est de construire un nouveau processus.
Les processus électoraux de n'importe quelle société latino-américaine sont virtuellement inévitables pour les peuples en voie de libération ; Nous ne sommes pas une exception, mais cela ne doit pas être considéré comme une obligation, mais comme une mission de plus. Il est clair qu'en ce moment, notre participation aux élections aurait des effets plus destructeurs que positifs ; Les conditions ne sont pas réunies et le contrôle des putschistes sur tous les organismes d'application de la justice, ne rendent pas, pour l'instant, cette possibilité viable. Néanmoins, la réalité est dynamique et la conjoncture peut changer, celle-ci nous oblige parfois, de manière soudaine, à prendre des décisions transcendentales. Le fait que nous ne soyons pas prêts ne veut pas dire nous devions rester immobiles, au contraire, cela nous oblige à mener notre lutte à plusieurs niveaux de l'action organisée pour exiger que les conditions soient celles dont nous avons besoin.
Le Front National de Résistance Populaire en tant qu'entité politique doit continuer l'important travail d'organisation, de formation et de mobilisation dans toutes les unités géographiques du pays, depuis le hameau jusqu'au niveau national. Nous avons besoin d'envirion 25 milles directives pour être prêts : Aucun changement n'est possible si le peuple n'est pas prêt.
Il faut savoir qu'au sein du front, il y a des hommes et des femmes bien décidés à lutter contre tout et à tout risquer, ne gâchons pas l'opportunité qui nous est donnée en créant maintenant des compétitions stériles entre nous.
La marche implacable du néo-libéralisme dans notre pays, les violations des droits humains, la mutilation des conquêtes sociales des enseignants, des ouvriers, des paysans et des indigènes, nous démontrent qu'en la matière nous avons régressé de plusieurs années, en particulier avec la réapparition de pratiques du crime politique qui remontent aux années 80'. Nous ne pouvons espérer que quelqu'un d' autre fera la justice pour nous. Nous devons exiger immédiatement le démantèlement de tout l'appareil qui couvre les groupes paramilitaires et le système d'administration de la justice, non seulement pour sa complicité dans le coup d'Etat mais aussi pour son attitude complaisante envers les bourreaux du peuple. Nous n' y arriverons qu'avec l'action permanente de la pression populaire.
Nous devons dénoncer les groupes qui agissent comme des chiens assoiffés de sang et dont le désir de torturer est insatiable, autant que l'injustice et l'isolement dans lesquels nous sommes, nous devons les dénoncer de façon quotidienne, sur les plans national et international, nous ne pouvons laisser cette charge immense à un groupe de défenseurs de droits humains qui ont chaque jour plus de travail, à cause de l'impunité dans laquelle agissent les assassins. Nous défendre est du devoir de tous et défier le système de justice qui nous opprime est une manière légitime de nous protéger.
la mission consiste à nous renforcer et à ouvrir autant de fronts de lutte pour nos revendications qu'il sera possible, sans trêve, de la même façon qu'ils sont implacables, nous devons démontrer que nous sommes invincibles.
L'auto-convocation de la constituante est une proposition que nous formulons depuis le mois d'août 2010, et nous devons nous y tenir jusqu'à l'élaboration de la nouvelle constitution où apparaissent nos droits souverains.
Il est impératif de demander que les figures du référendum et du plebiscite deviennent transparents dans les plus brefs délais, ainsi, nous mobilisons le peuple, nous l'organisons et nous prenons l'ennemi à son propre piège.
Nous voulons une société libre qui restecte le droit à la propriété mais que ce droit particulier ne soit pas au dessus du droit collectif. Nous voulons que les citoyens soient au dessus du marché et que le bien-être commun soit le but de la société. Le Honduras n'est pas une propriété privée, inscrite sur le registre du marché au nom de quelques familles qui se croient propriétaires du patrimoine national.
Ceux qui sentent que cette lutte ne répond pas à leurs attentes devraient considérer sérieusement la possibilité qu'ils se trompent.
Compatriotes, ce n'est pas non plus en nous croyant plus révolutionnaires que d'autres que nous construisons le nouveau Honduras, c'est en reconnaissant le révolutionnaire qu'il y a en chaque résident, ceux des différentes forces politiques -libéraux UD- que nous intégrons au front.
Exiger la restauration de l'Etat démocratique, la fin de l'impunité pour les crimes de lèse humanité et la convocation d'une large Assemblée Nationale Constituante, incluante, juste, souveraine et originaire est une mission que nous devons mener à bien.
Depuis presque deux ans que nous avons été expulsés violemment de notre terre, avec des centaines de compatriotes, nous croyons que cette assemblée est un acte d'espoir pour la refondation du Honduras, et qu'elle remplira sa mission d'abonder en positions d'unité et en pratiques démocratiques.
Nous résistons et nous vaincrons
Resistimos y venceremos.
José Manuel Zelaya Rosales
jeudi 24 février 2011
L’ONU dénonce l’état de malnutrition d’un grand nombre d’enfants honduriens
New York, 11 février (RHC)
Le Programme mondial des Aliments de l’ONU a fait savoir que quelque 800 000 enfants honduriens souffrent de malnutrition chronique.
Miguel Barreto, représentant de cette entité a qualifié d’alarmant le nombre de familles qui n’ont pas accès aux aliments de base dans ce pays centraméricain où la pauvreté extrême touche 7 sur 10 personnes.
Il a expliqué que 27% des enfants ayant de carences alimentaires présentent des problèmes de développement physique et intellectuel, ce qui entrave leur incorporation active à la société.
Le Programme mondial des Aliments de l’ONU a fait savoir que quelque 800 000 enfants honduriens souffrent de malnutrition chronique.
Miguel Barreto, représentant de cette entité a qualifié d’alarmant le nombre de familles qui n’ont pas accès aux aliments de base dans ce pays centraméricain où la pauvreté extrême touche 7 sur 10 personnes.
Il a expliqué que 27% des enfants ayant de carences alimentaires présentent des problèmes de développement physique et intellectuel, ce qui entrave leur incorporation active à la société.
Manuel Zelaya accuse Porfirio Lobo de vouloir détruire l’opposition au Honduras
Tegucigalpa, 8 février (AP-RHC)
Le Président déchu du Honduras, Manuel Zelaya a accusé l’actuel président, Porfirio Lobo de se confabuler avec la droite internationale pour détruire ses partisans au Honduras.
Il a signalé que l’oligarchie hondurienne, appuyée par les États-Unis n’épargne pas de ressources pour ce faire.
Manuel Zelaya n’a pas donné des détails du plan contre ses partisans, regroupés au sein du Front National de la Résistance Populaire dans un message électronique qu’il a adressé à ce Front et à l’agence AP.
Manuel Zelaya qui vit en exil en République Dominicaine a déclaré que Profirio Lobo engage des mercenaires et des spécialistes en conspirations.
Le Président déchu du Honduras, Manuel Zelaya a accusé l’actuel président, Porfirio Lobo de se confabuler avec la droite internationale pour détruire ses partisans au Honduras.
Il a signalé que l’oligarchie hondurienne, appuyée par les États-Unis n’épargne pas de ressources pour ce faire.
Manuel Zelaya n’a pas donné des détails du plan contre ses partisans, regroupés au sein du Front National de la Résistance Populaire dans un message électronique qu’il a adressé à ce Front et à l’agence AP.
Manuel Zelaya qui vit en exil en République Dominicaine a déclaré que Profirio Lobo engage des mercenaires et des spécialistes en conspirations.
lundi 10 janvier 2011
Interview de François Houtart, membre de la Commission de la Vérité au Honduras
20 décembre 2010
Giorgio Trucchi
Interview de François Houtart
Le Honduras se débat en pleine crise économique, sociale et politique depuis le coup d’État qui a chassé du pouvoir le président Manuel Zelaya en juin 2009. Malgré l’image de “pays pacifié et normalisé” que l’actuel gouvernement de Porfirio Lobo tente de projeter internationalement, les organisations qui intègrent la Plateforme des droits humains du Honduras continuent de dénoncer les constantes violations des droits de l’homme et ont installé une "commission de la vérité" pour éclairer les abus commis depuis du coup d’État.
François Houtart, prêtre, sociologue, membre du Conseil international du Forum social mondial est également membre de la Commission de la vérité. Dans cet entretien donné à Opera Mundi, il analyse la délicate situation que vit le Honduras. Le sociologue belge est convaincu qu’une consolidation du projet de refondation du FNRP (Front national de résistance populaire) pourrait impliquer une augmentation de la répression et que le gouvernement des États-Unis n’est pas étranger à cette situation. Selon lui, ce dernier souhaite se repositionner dans la région latinoaméricaine, le coup d’État au Honduras étant une pièce importante de cette stratégie.
GT : Dix-sept mois après le coup d’Etat au Honduras, comment voyez-vous la situation des droits de l’homme dans ce pays ?
F.H : Elle ne s’améliore pas. Elle empire même avec la difficile situation sociale et économique. Nous savons que le coup d’Etat a été mené par une oligarchie traditionnelle opposée aux processus de changements. Elle refuse de perdre ses privilèges. A présent qu’elle détient de nouveau le pouvoir et qu’elle contrôle la politique et l’économie, elle refuse toute autre avancée sociale. Tous ceux qui tentent de lutter sont vus comme des ennemis à abattre. Il ne se passe pas de nouvelle semaine sans victimes. Nous vivons encore une situation très tendue.
GT : Quel est le rôle de la Commission de la vérité dans un contexte aussi compliqué ?
FH : Les objectifs de la commission sont d’enquêter sur les violations des droits humains à partir du coup d’État, sur l’histoire de ce dernier, ses conséquences, sur qui furent les acteurs à l’origine de cet événement. Et finalement, d’enquêter sur le contexte général du pays car on ne peut comprendre ces faits sans connaître la structure sociale, économique et politique du Honduras. Tout ceci permettra d’éclairer ce qui s’est réellement passé et de montrer qui sont les véritables responsables.
GT : Récemment, le représentant du Département d’Etat nord-américain Philip J. Crowley a déclaré que “le thème des droits de l’homme n’est pas une condition préalable au retour du Honduras au sein de l’Organisation des Etats américains (OEA)”. Quelle lecture faites-vous de cette déclaration ?
FH : Cela fait partie de la logique politique des Etats-Unis. Ils ont condamné le coup d’État comme méthode mais pas comme objectif : stopper les processus de changement en cours. A présent, ils veulent légitimer l’actuel gouvernement pour poursuivre ses politiques et donner l’apparence d’une normalisation dans la région.
GT : Quel rôle a joué le coup d’Etat au Honduras dans la région ?
FH : Le Honduras était l’élément le plus fragile de l’ensemble des pays qui mènent des processus de transformation. C’est donc un avertissement à tout le continent et nous avons observé des suites dans plusieurs pays. Lorsqu’un pays refuse de s’aligner sur les politiques nord-américaines et les oligarchies locales, on observe des interventions non plus militaires comme par le passé, mais des déstabilisations qui s’appuient sur de nouvelles méthodes et instruments.
GT : La question du rôle du président Obama dans le coup d’État au Honduras est posée par certains. Qu’en pensez-vous ?
FH : Quand on observe sa politique extérieure, il ne fait pas de doute qu’il s’agit d’une continuité avec la période antérieure. Le style peut différer, pas la substance. Le cas du Honduras en fournit une claire illustration.
GT : On dit aussi que les Etats-Unis ont beaucoup de problèmes au Moyen-Orient et qu’en ce moment l’Amérique latine ne constitue pas une priorité.
FH : Le continent latino-américain conservera toujours une grande importance pour les États-Unis, le contrôler est nécessaire. Il est évident que les processus d’unité latinoaméricaine les préoccupent beaucoup. Comme les préoccupent également l’orientation de ces processus qui cherchent à envisager l’économie et la politique au delà de l’économie capitaliste et de l’économie de marché. Il s’agit, pour les Etats-Unis, d’une menace à long terme pour la continuité du système et leurs intérêts.
GT : Dans le cas du Honduras, est-ce un tel changement de système qui préoccupe le plus les États-Unis ?
FH : Pour une part, en effet. Mais le plus important est l’adhésion du Honduras à l’Alliance bolivarienne des peuples d’Amérique ( Alba). Du point de vue des Etats-Unis, il s’agissait d’un mauvais signal pour d’autres pays de la región centraméricaine et c’est pourquoi ils ont décidé d’intervenir.
GT : Le processus de formation du FNRP au Honduras est inédit dans la région. Croyez-vous que le Front pourra atteindre l’objectif de refonder le pays ?
FH : Il s’agit d’une résistance organisée par des mouvements de base et c’est quelque chose de très innovateur. Je crois qu’il pourra atteindre ses objectifs tant qu’il maintiendra l’unité de tous les secteurs et que tôt ou tard, il puisse trouver une traduction dans le champ politique pour promouvoir des réformes structurelles de l’Etat.
GT : Une montée en puissance du FNRP peut-elle impliquer davantage de répression ?
FH : Cela ne fait pas de doute. Le gouvernement actuel croit que les gens vont se lasser et que la résistance va disparaître peu à peu. Si cela ne se produit pas, comme je le crois, il va s’écrire un scénario de violence très préoccupant.
GT : Dans ce contexte, la présence d’une Commission de la vérité revêt une importance accrue ?
FH : Les travaux ont déjà commencé. Tous les membres ont parcouru le pays pour recueillir des témoignages et analyser les avancées du processus.
Source : http://operamundi.uol.com.br (original portugais) http://nicaraguaymasespanol.blogspot.com (version espagnole)
P.-S.
Traduction française : Thierry Deronne
Giorgio Trucchi
Interview de François Houtart
Le Honduras se débat en pleine crise économique, sociale et politique depuis le coup d’État qui a chassé du pouvoir le président Manuel Zelaya en juin 2009. Malgré l’image de “pays pacifié et normalisé” que l’actuel gouvernement de Porfirio Lobo tente de projeter internationalement, les organisations qui intègrent la Plateforme des droits humains du Honduras continuent de dénoncer les constantes violations des droits de l’homme et ont installé une "commission de la vérité" pour éclairer les abus commis depuis du coup d’État.
François Houtart, prêtre, sociologue, membre du Conseil international du Forum social mondial est également membre de la Commission de la vérité. Dans cet entretien donné à Opera Mundi, il analyse la délicate situation que vit le Honduras. Le sociologue belge est convaincu qu’une consolidation du projet de refondation du FNRP (Front national de résistance populaire) pourrait impliquer une augmentation de la répression et que le gouvernement des États-Unis n’est pas étranger à cette situation. Selon lui, ce dernier souhaite se repositionner dans la région latinoaméricaine, le coup d’État au Honduras étant une pièce importante de cette stratégie.
GT : Dix-sept mois après le coup d’Etat au Honduras, comment voyez-vous la situation des droits de l’homme dans ce pays ?
F.H : Elle ne s’améliore pas. Elle empire même avec la difficile situation sociale et économique. Nous savons que le coup d’Etat a été mené par une oligarchie traditionnelle opposée aux processus de changements. Elle refuse de perdre ses privilèges. A présent qu’elle détient de nouveau le pouvoir et qu’elle contrôle la politique et l’économie, elle refuse toute autre avancée sociale. Tous ceux qui tentent de lutter sont vus comme des ennemis à abattre. Il ne se passe pas de nouvelle semaine sans victimes. Nous vivons encore une situation très tendue.
GT : Quel est le rôle de la Commission de la vérité dans un contexte aussi compliqué ?
FH : Les objectifs de la commission sont d’enquêter sur les violations des droits humains à partir du coup d’État, sur l’histoire de ce dernier, ses conséquences, sur qui furent les acteurs à l’origine de cet événement. Et finalement, d’enquêter sur le contexte général du pays car on ne peut comprendre ces faits sans connaître la structure sociale, économique et politique du Honduras. Tout ceci permettra d’éclairer ce qui s’est réellement passé et de montrer qui sont les véritables responsables.
GT : Récemment, le représentant du Département d’Etat nord-américain Philip J. Crowley a déclaré que “le thème des droits de l’homme n’est pas une condition préalable au retour du Honduras au sein de l’Organisation des Etats américains (OEA)”. Quelle lecture faites-vous de cette déclaration ?
FH : Cela fait partie de la logique politique des Etats-Unis. Ils ont condamné le coup d’État comme méthode mais pas comme objectif : stopper les processus de changement en cours. A présent, ils veulent légitimer l’actuel gouvernement pour poursuivre ses politiques et donner l’apparence d’une normalisation dans la région.
GT : Quel rôle a joué le coup d’Etat au Honduras dans la région ?
FH : Le Honduras était l’élément le plus fragile de l’ensemble des pays qui mènent des processus de transformation. C’est donc un avertissement à tout le continent et nous avons observé des suites dans plusieurs pays. Lorsqu’un pays refuse de s’aligner sur les politiques nord-américaines et les oligarchies locales, on observe des interventions non plus militaires comme par le passé, mais des déstabilisations qui s’appuient sur de nouvelles méthodes et instruments.
GT : La question du rôle du président Obama dans le coup d’État au Honduras est posée par certains. Qu’en pensez-vous ?
FH : Quand on observe sa politique extérieure, il ne fait pas de doute qu’il s’agit d’une continuité avec la période antérieure. Le style peut différer, pas la substance. Le cas du Honduras en fournit une claire illustration.
GT : On dit aussi que les Etats-Unis ont beaucoup de problèmes au Moyen-Orient et qu’en ce moment l’Amérique latine ne constitue pas une priorité.
FH : Le continent latino-américain conservera toujours une grande importance pour les États-Unis, le contrôler est nécessaire. Il est évident que les processus d’unité latinoaméricaine les préoccupent beaucoup. Comme les préoccupent également l’orientation de ces processus qui cherchent à envisager l’économie et la politique au delà de l’économie capitaliste et de l’économie de marché. Il s’agit, pour les Etats-Unis, d’une menace à long terme pour la continuité du système et leurs intérêts.
GT : Dans le cas du Honduras, est-ce un tel changement de système qui préoccupe le plus les États-Unis ?
FH : Pour une part, en effet. Mais le plus important est l’adhésion du Honduras à l’Alliance bolivarienne des peuples d’Amérique ( Alba). Du point de vue des Etats-Unis, il s’agissait d’un mauvais signal pour d’autres pays de la región centraméricaine et c’est pourquoi ils ont décidé d’intervenir.
GT : Le processus de formation du FNRP au Honduras est inédit dans la région. Croyez-vous que le Front pourra atteindre l’objectif de refonder le pays ?
FH : Il s’agit d’une résistance organisée par des mouvements de base et c’est quelque chose de très innovateur. Je crois qu’il pourra atteindre ses objectifs tant qu’il maintiendra l’unité de tous les secteurs et que tôt ou tard, il puisse trouver une traduction dans le champ politique pour promouvoir des réformes structurelles de l’Etat.
GT : Une montée en puissance du FNRP peut-elle impliquer davantage de répression ?
FH : Cela ne fait pas de doute. Le gouvernement actuel croit que les gens vont se lasser et que la résistance va disparaître peu à peu. Si cela ne se produit pas, comme je le crois, il va s’écrire un scénario de violence très préoccupant.
GT : Dans ce contexte, la présence d’une Commission de la vérité revêt une importance accrue ?
FH : Les travaux ont déjà commencé. Tous les membres ont parcouru le pays pour recueillir des témoignages et analyser les avancées du processus.
Source : http://operamundi.uol.com.br (original portugais) http://nicaraguaymasespanol.blogspot.com (version espagnole)
P.-S.
Traduction française : Thierry Deronne
samedi 8 janvier 2011
Au Honduras, les uns comptent leurs dollars, les autres leurs morts
Par Hélène Roux, Le Monde Diplomatique, décembre 2010.
Le 15 novembre 2010, la région du bas Aguán au Honduras a été le
théâtre d’un massacre de plus, perpétré contre cinq paysans membres de
l’organisation paysanne Movimiento Campesino del Aguán (MCA). Les
faits se sont produits à l’aube du 15 novembre, lorsque deux cents
gardes armés à la solde de M. Miguel Facussé Barjum (1), le magnat
hondurien de la palme africaine, ont tiré avec des armes de gros
calibre sur un groupe de paysans qui venait présenter les papiers les
accréditant comme légitimes propriétaires de la finca (propriété) El
Tumbador (municipalité de Trujillo).
Ces assassinats constituent un nouvel épisode dans le conflit agraire
qui oppose de longue date le MCA aux grands entrepreneurs et
propriétaires terriens de la région : M. Facussé Barjum – président de
la société Dinant et oncle de l’ex-président libéral Carlos Flores
Facussé (1998-2002) –, M. René Morales Carazo – industriel et frère du
vice-président de la République du Nicaragua, M. Jaime Morales Carazo
–, M. Reynaldo Canales – lui aussi grand patron –, et M. Oscar Najerá
– député du parti Libéral (droite).
A la différence d’autres pays d’Amérique latine, où la culture de la
palme africaine connaît un essor très récent – lié à l’élaboration des
agro-carburants –, celle-ci est présente au Honduras depuis les années
1970. A cette époque, des réformes agraires ont en effet été promues –
souvent par des gouvernements militaires, comme au Pérou et au
Honduras – pour réduire la pression sur les latifundia (grandes
propriétés) et contrôler le mouvement paysan. La culture de la palme
constitue donc un enjeu économique important, qui explique d’une part
la force et la capacité des coopératives paysannes, et d’autre part la
convoitise des grands propriétaires et entrepreneurs de l’industrie de
transformation du précieux végétal.
Au début des années 1990, sous la présidence de M. Leonardo Callejas
(Parti national [PN], droite), se met en place la loi de modernisation
et développement du secteur agricole (2), qui modifie celle de 1962
sur la réforme agraire. Suivant la même tendance que dans le reste des
pays d’Amérique latine, la nouvelle loi privilégie la « sécurisation
de la propriété » à travers la titularisation individuelle des terres
et l’incursion croissante du secteur privé dans le financement de la
production agricole. Ce procédé – développé et promu par la Banque
mondiale – est également connu sous l’appellation trompeuse de «
réforme agraire assistée par le marché ».
La majorité des organisations paysannes du Honduras s’accorde sur le
fait que cette loi marque le début d’une accélération de la
réappropriation privée des terres anciennement attribuées à des
coopératives dans le cadre de la réforme agraire des années 1960.
Considérant cet accaparement comme illégal, les paysans partent à la
reconquête des terres. C’est dans ce contexte que le MCA voit le jour,
début mai 2000, en occupant les terres du Centre régional
d’entraînement militaire (CREM), soit plusieurs milliers d’hectares
utilisés pendant les années 1980 par les instructeurs de l’armée des
Etats-Unis pour former les combattants de la Contra nicaraguayenne.
Pour le MCA, l’objectif consiste à faire pression pour l’application
des dispositions légales établissant l’usage social de la terre et
limitant la concentration agraire.
Dans les premiers temps, la tension entre les paysans et les
propriétaires terriens est si forte que le président de la République
(l’homme d’affaires Ricardo Maduro, PN) n’a d’autre choix que
d’intervenir en personne. Le 12 octobre 2000, 1124 hectares sont
titularisés au nom des coopératives du MCA, cependant que l’Institut
national agraire (INA) entreprend des démarches pour annuler les
titres de propriété indûment attribués aux grands propriétaires.
Toutefois la victoire est de courte durée et, pendant des années, la
situation reste explosive et le harcèlement constant.
Le 12 juin 2009, un accord est pourtant signé entre le président
hondurien, M. Manuel Zelaya, et les organisations paysannes de
l’Aguán. Il établit qu’aucune expulsion ne pourra se réaliser avant
que la légalité sur les titres de propriété et les ventes de terres
n’ait été établie par les autorités compétentes. Mais le coup d’Etat
du 28 juin 2009 met fin à cette courte trêve. Le MCA, qui, comme de
nombreuses organisations populaires, a rejoint le Front national de
résistance contre le golpe (3), se retrouve une fois de plus dans la
ligne de mire.
Les attaques reprennent avec plus de vigueur au début de l’année 2010,
avec l’entrée en fonction du gouvernement de facto de M. Porfirio
Lobo, parvenu au pouvoir lors des élections organisées à l’ombre du
putsch militaire, en novembre 2009. Face à la paralysie du processus
de titularisation, le mouvement (4), qui recense désormais plus de 3
500 familles organisées en centaines de coopératives, a en effet
décidé de reprendre, le 9 décembre 2009, les occupations de terres.
Le 8 janvier, une première expulsion violente des terres nouvellement
occupées a lieu : 27 personnes, dont dix femmes, sont détenues. Le 13
janvier, trois dirigeants du MCA sont arrêtés, ce qui porte à 18 le
nombre de membres du MCA emprisonnés depuis la création du mouvement.
Dans un communiqué, l’organisation dénonce par ailleurs la présence
menaçante d’hommes armés aux alentours des terrains des coopératives
et accuse un colonel de l’armée de « prêter ses services » aux
entrepreneurs de la palme africaine.
Mi-février 2010, des groupes paramilitaires à la solde des grands
propriétaires, appuyés par l’armée et la police, attaquent les
campements du MCA et font plusieurs blessés. Les faits se produisent
alors même qu’une délégation du MCA négocie la ratification des
accords signés avant le putsch de 2009, avec l’actuel ministre de la
réforme agraire, Cesar Ham. Ce dernier, un ancien député du parti de
gauche Union démocratique (UD), s’est à la fois opposé au coup d’Etat…
et l’a légitimé en acceptant d’entrer au gouvernement de M. Lobo.
Depuis cette « position », il prétend jouer le rôle de « courroie de
transmission » des revendications populaires auprès du gouvernement.
Début mars 2010, de nouvelles négociations s’ouvrent entre le
gouvernement et les paysans du MCA alors que la région est totalement
militarisée et subit une intense répression. Quarante personnes ont
été détenues pendant le processus de dialogue, y compris le
responsable régional de l’INA, M. Coronado Ávila Mendoza. Le dirigeant
du MCA, M. Rudy Hernandez, décrit la situation : « La région du bas
Aguán a été inondée de militaires, 28 coopératives étaient en cours de
récupération (de leurs terres) et c’est pour cette raison que le 13
avril, après une réunion de plus de quinze heures avec le
gouvernement, qui ne voulait nous concéder que 6000 hectares, nous en
avons obtenu 11 000. Nous avons signé parce que nous étions sous la
menace des canons et nous ne pouvions pas mettre en danger la vie de
nos compagnons. Malgré tout, la lutte n’a pas été seulement pour cette
quantité de terres mais pour toute la terre assignée à la réforme
agraire (5). »
Le 13 avril 2010 les deux parties « s’entendent » donc : 3 000
hectares de terres affectées à la palme africaine seront titularisés
immédiatement en faveur de 28 coopératives et après évacuation
volontaire des champs occupés (par les paysans), les mêmes surfaces
(en friche) leur seront attribuées dans un délai de trois mois et à un
autre emplacement. Enfin, dans un délai d’un an, les paysans devront
recevoir 1 000 hectares cultivés en palme et 4 000 hectares non
cultivés. Le président de facto se rend lui-même sur place et se porte
garant des accords.
Mais l’apaisement qu’on aurait pu attendre à partir de la signature
des accords n’a pas lieu. Au contraire, la zone de l’Aguán connaît un
regain de tension. En effet, le magnat de la palme, M. Facussé, donne
la mesure du peu de cas qu’il fait des dispositions légales. Il
annonce qu’il fera appel des décisions prises auprès des tribunaux.
Allant au-devant de ses désirs, le 20 avril, l’armée resserre son étau
autour de la communauté Guadalupe Carney (fondée sur les terres
occupées du CREM), qui se retrouve complètement encerclée par plus
d’une centaine d’effectifs des commandos Cobras et de militaires. Le
prétexte : l’arrestation de membres du MCA. Par ailleurs, le syndicat
des travailleurs de l’INA (Sindicato de Trabajadores del INA
[SITRAINA]) de la région dénonce des menaces et des intimidations
contre ses membres.
Le 23 avril, alors que le MCA fait état de l’invasion imminente de la
communauté Guadalupe Carney par l’armée, M. Facussé annonce qu’il
refuse de négocier ne serait-ce qu’un hectare de terre. Le bras de fer
engagé avec le MCA s’étend à l’INA et à son directeur dont le
propriétaire réclame ouvertement la tête. Cette situation révèle le
double jeu du gouvernement qui, d’un côté, fait mine de jouer la
conciliation par le biais de l’INA, et de l’autre, prend prétexte du
climat de tension pour militariser la région.
Quelques jours plus tard, le 28 avril, la radio communautaire de
Zacate Grande (une communauté située dans le golfe de Fonseca, région
pacifique, à 150 km de la capitale) est attaquée et détruite par des
hommes armés à la solde de M. Facussé.
Le 25 mai, le quotidien La Prensa avait publié un entretien avec M.
Facussé dans lequel celui-ci affirmait que « le problème de l’Aguán
détruirait l’économie », laissant ainsi entendre que le « climat
d’insurrection » dans la région faisait fuir les investisseurs
étrangers (6). En juin 2010, l’annonce du licenciement de 500 employés
des entreprises de Miguel Facussé dans la région constitue une
manœuvre de plus pour attiser les dissensions entre les paysans.
Le 21 juin, une opération conjointe de membres des bataillons Cobras
et des vigiles de l’entreprise de sécurité Orión (recrutée par M.
Facussé), menée dans le but d’arrêter deux membres de la coopérative
La Aurora, provoque la mort d’un jeune de 17 ans. L’autopsie révèle
douze impacts de balles (7). Le communiqué du MCA souligne que la
finca La Aurora avait été assignée à la coopérative par l’INA.
Le 17 août, trois membres du MCA (dont un adolescent de 14 ans) sont
assassinés. Quelques jours plus tard, un affrontement a lieu à Zacate
Grande entre les occupants des terres récupérées et les habitants de
villages voisins, à qui M. Facussé a remis des « titres de propriété »
et fait miroiter la construction d’un collège pour leurs enfants.
La liste des intimidations et arrestations arbitraires s’allonge tous
les jours mais les institutions financières internationales ne
sourcillent pas. Dans une lettre (8) adressée le 17 novembre 2010 au
président de la Banque mondiale, M. Robert Zoellick, l’ONG canadienne
Rights Action accuse celle-ci d’être coresponsable des exactions
commises dans l’Aguán. Dénonciation fondée sur le fait que le 5
novembre 2009, Dinant avait reçu de la Corporation financière
internationale (IFC) – chargée de l’attention au secteur privé au sein
de la Banque mondiale – le prêt n° 27.250, à hauteur de 30 millions de
dollars.
Les rumeurs, régulièrement relayées par la presse, faisant état de
l’existence de groupes armés au sein du MCA se sont renforcées ces
derniers jours. Certains médias croyant même savoir que les bases
d’entrainement de la guérilla se trouveraient au Nicaragua (9)… Ironie
du sort : les terres originalement occupées par le MCA, avaient,
elles, bel et bien servi de base pour les troupes de la Contra, dont
l’objectif était précisément d’agresser le Nicaragua voisin…
Le massacre du 15 novembre a donné un nouveau prétexte à l’envoi de
l’armée dans la région. Mais contre toute attente, au lieu de s’en
prendre aux milices armées des entrepreneurs de la palme, ce sont les
bureaux de l’INA – ceux-là même où sont entreposés les dossiers de
régularisation des terres du MCA – qui ont été militarisés.
Le 6 décembre les paysans ont repris les blocages de route pour exiger
que justice soit faite. Le 7 décembre, un communiqué du MUCA avertit
que la communauté Guadalupe Carney est de nouveau encerclée par l’armée.
Le 15 décembre, 600 militaires ont pris position sur les collines
alentours et des hélicoptères survolent la zone.
Note :
(1) Giorgio Trucchi, « Masacre y barbarie en el Bajo Aguán »,
Secrétariat régional latino-américain (Rel-UITA), 16 novembre 2010.
(2) « Ley para la Modernización y Desarrollo del Sector Agrícola
(LMDSA) », Institut agraire national (INA), 5 mars 1992.
(3) Aujourd’hui Front national de résistance populaire (FNRP).
(4) Qui se présente également sous le sigle MUCA (Mouvement uni des
paysans de l’Aguán).
(5) German Reyes, « Incumplimiento del gobierno caldea los animos en
el Aguán », Revistazo, 18 novembre 2010.
(6) « Problema del Aguán destruiría la economía », La Prensa, 25 mai 2010.
(7) Giorgio Trucchi, « Asesinato salvaje de joven del MUCA »,
Rel-UITA, 22 juin 2010.
(8) « Letter to the World Bank », Rights Action, 17 novembre 2010.
(9) « Hondureños estarían entrenándose en Nicaragua para
desestabilizar orden legal y democracia », El Proceso, 24 novembre 2010.
Le 15 novembre 2010, la région du bas Aguán au Honduras a été le
théâtre d’un massacre de plus, perpétré contre cinq paysans membres de
l’organisation paysanne Movimiento Campesino del Aguán (MCA). Les
faits se sont produits à l’aube du 15 novembre, lorsque deux cents
gardes armés à la solde de M. Miguel Facussé Barjum (1), le magnat
hondurien de la palme africaine, ont tiré avec des armes de gros
calibre sur un groupe de paysans qui venait présenter les papiers les
accréditant comme légitimes propriétaires de la finca (propriété) El
Tumbador (municipalité de Trujillo).
Ces assassinats constituent un nouvel épisode dans le conflit agraire
qui oppose de longue date le MCA aux grands entrepreneurs et
propriétaires terriens de la région : M. Facussé Barjum – président de
la société Dinant et oncle de l’ex-président libéral Carlos Flores
Facussé (1998-2002) –, M. René Morales Carazo – industriel et frère du
vice-président de la République du Nicaragua, M. Jaime Morales Carazo
–, M. Reynaldo Canales – lui aussi grand patron –, et M. Oscar Najerá
– député du parti Libéral (droite).
A la différence d’autres pays d’Amérique latine, où la culture de la
palme africaine connaît un essor très récent – lié à l’élaboration des
agro-carburants –, celle-ci est présente au Honduras depuis les années
1970. A cette époque, des réformes agraires ont en effet été promues –
souvent par des gouvernements militaires, comme au Pérou et au
Honduras – pour réduire la pression sur les latifundia (grandes
propriétés) et contrôler le mouvement paysan. La culture de la palme
constitue donc un enjeu économique important, qui explique d’une part
la force et la capacité des coopératives paysannes, et d’autre part la
convoitise des grands propriétaires et entrepreneurs de l’industrie de
transformation du précieux végétal.
Au début des années 1990, sous la présidence de M. Leonardo Callejas
(Parti national [PN], droite), se met en place la loi de modernisation
et développement du secteur agricole (2), qui modifie celle de 1962
sur la réforme agraire. Suivant la même tendance que dans le reste des
pays d’Amérique latine, la nouvelle loi privilégie la « sécurisation
de la propriété » à travers la titularisation individuelle des terres
et l’incursion croissante du secteur privé dans le financement de la
production agricole. Ce procédé – développé et promu par la Banque
mondiale – est également connu sous l’appellation trompeuse de «
réforme agraire assistée par le marché ».
La majorité des organisations paysannes du Honduras s’accorde sur le
fait que cette loi marque le début d’une accélération de la
réappropriation privée des terres anciennement attribuées à des
coopératives dans le cadre de la réforme agraire des années 1960.
Considérant cet accaparement comme illégal, les paysans partent à la
reconquête des terres. C’est dans ce contexte que le MCA voit le jour,
début mai 2000, en occupant les terres du Centre régional
d’entraînement militaire (CREM), soit plusieurs milliers d’hectares
utilisés pendant les années 1980 par les instructeurs de l’armée des
Etats-Unis pour former les combattants de la Contra nicaraguayenne.
Pour le MCA, l’objectif consiste à faire pression pour l’application
des dispositions légales établissant l’usage social de la terre et
limitant la concentration agraire.
Dans les premiers temps, la tension entre les paysans et les
propriétaires terriens est si forte que le président de la République
(l’homme d’affaires Ricardo Maduro, PN) n’a d’autre choix que
d’intervenir en personne. Le 12 octobre 2000, 1124 hectares sont
titularisés au nom des coopératives du MCA, cependant que l’Institut
national agraire (INA) entreprend des démarches pour annuler les
titres de propriété indûment attribués aux grands propriétaires.
Toutefois la victoire est de courte durée et, pendant des années, la
situation reste explosive et le harcèlement constant.
Le 12 juin 2009, un accord est pourtant signé entre le président
hondurien, M. Manuel Zelaya, et les organisations paysannes de
l’Aguán. Il établit qu’aucune expulsion ne pourra se réaliser avant
que la légalité sur les titres de propriété et les ventes de terres
n’ait été établie par les autorités compétentes. Mais le coup d’Etat
du 28 juin 2009 met fin à cette courte trêve. Le MCA, qui, comme de
nombreuses organisations populaires, a rejoint le Front national de
résistance contre le golpe (3), se retrouve une fois de plus dans la
ligne de mire.
Les attaques reprennent avec plus de vigueur au début de l’année 2010,
avec l’entrée en fonction du gouvernement de facto de M. Porfirio
Lobo, parvenu au pouvoir lors des élections organisées à l’ombre du
putsch militaire, en novembre 2009. Face à la paralysie du processus
de titularisation, le mouvement (4), qui recense désormais plus de 3
500 familles organisées en centaines de coopératives, a en effet
décidé de reprendre, le 9 décembre 2009, les occupations de terres.
Le 8 janvier, une première expulsion violente des terres nouvellement
occupées a lieu : 27 personnes, dont dix femmes, sont détenues. Le 13
janvier, trois dirigeants du MCA sont arrêtés, ce qui porte à 18 le
nombre de membres du MCA emprisonnés depuis la création du mouvement.
Dans un communiqué, l’organisation dénonce par ailleurs la présence
menaçante d’hommes armés aux alentours des terrains des coopératives
et accuse un colonel de l’armée de « prêter ses services » aux
entrepreneurs de la palme africaine.
Mi-février 2010, des groupes paramilitaires à la solde des grands
propriétaires, appuyés par l’armée et la police, attaquent les
campements du MCA et font plusieurs blessés. Les faits se produisent
alors même qu’une délégation du MCA négocie la ratification des
accords signés avant le putsch de 2009, avec l’actuel ministre de la
réforme agraire, Cesar Ham. Ce dernier, un ancien député du parti de
gauche Union démocratique (UD), s’est à la fois opposé au coup d’Etat…
et l’a légitimé en acceptant d’entrer au gouvernement de M. Lobo.
Depuis cette « position », il prétend jouer le rôle de « courroie de
transmission » des revendications populaires auprès du gouvernement.
Début mars 2010, de nouvelles négociations s’ouvrent entre le
gouvernement et les paysans du MCA alors que la région est totalement
militarisée et subit une intense répression. Quarante personnes ont
été détenues pendant le processus de dialogue, y compris le
responsable régional de l’INA, M. Coronado Ávila Mendoza. Le dirigeant
du MCA, M. Rudy Hernandez, décrit la situation : « La région du bas
Aguán a été inondée de militaires, 28 coopératives étaient en cours de
récupération (de leurs terres) et c’est pour cette raison que le 13
avril, après une réunion de plus de quinze heures avec le
gouvernement, qui ne voulait nous concéder que 6000 hectares, nous en
avons obtenu 11 000. Nous avons signé parce que nous étions sous la
menace des canons et nous ne pouvions pas mettre en danger la vie de
nos compagnons. Malgré tout, la lutte n’a pas été seulement pour cette
quantité de terres mais pour toute la terre assignée à la réforme
agraire (5). »
Le 13 avril 2010 les deux parties « s’entendent » donc : 3 000
hectares de terres affectées à la palme africaine seront titularisés
immédiatement en faveur de 28 coopératives et après évacuation
volontaire des champs occupés (par les paysans), les mêmes surfaces
(en friche) leur seront attribuées dans un délai de trois mois et à un
autre emplacement. Enfin, dans un délai d’un an, les paysans devront
recevoir 1 000 hectares cultivés en palme et 4 000 hectares non
cultivés. Le président de facto se rend lui-même sur place et se porte
garant des accords.
Mais l’apaisement qu’on aurait pu attendre à partir de la signature
des accords n’a pas lieu. Au contraire, la zone de l’Aguán connaît un
regain de tension. En effet, le magnat de la palme, M. Facussé, donne
la mesure du peu de cas qu’il fait des dispositions légales. Il
annonce qu’il fera appel des décisions prises auprès des tribunaux.
Allant au-devant de ses désirs, le 20 avril, l’armée resserre son étau
autour de la communauté Guadalupe Carney (fondée sur les terres
occupées du CREM), qui se retrouve complètement encerclée par plus
d’une centaine d’effectifs des commandos Cobras et de militaires. Le
prétexte : l’arrestation de membres du MCA. Par ailleurs, le syndicat
des travailleurs de l’INA (Sindicato de Trabajadores del INA
[SITRAINA]) de la région dénonce des menaces et des intimidations
contre ses membres.
Le 23 avril, alors que le MCA fait état de l’invasion imminente de la
communauté Guadalupe Carney par l’armée, M. Facussé annonce qu’il
refuse de négocier ne serait-ce qu’un hectare de terre. Le bras de fer
engagé avec le MCA s’étend à l’INA et à son directeur dont le
propriétaire réclame ouvertement la tête. Cette situation révèle le
double jeu du gouvernement qui, d’un côté, fait mine de jouer la
conciliation par le biais de l’INA, et de l’autre, prend prétexte du
climat de tension pour militariser la région.
Quelques jours plus tard, le 28 avril, la radio communautaire de
Zacate Grande (une communauté située dans le golfe de Fonseca, région
pacifique, à 150 km de la capitale) est attaquée et détruite par des
hommes armés à la solde de M. Facussé.
Le 25 mai, le quotidien La Prensa avait publié un entretien avec M.
Facussé dans lequel celui-ci affirmait que « le problème de l’Aguán
détruirait l’économie », laissant ainsi entendre que le « climat
d’insurrection » dans la région faisait fuir les investisseurs
étrangers (6). En juin 2010, l’annonce du licenciement de 500 employés
des entreprises de Miguel Facussé dans la région constitue une
manœuvre de plus pour attiser les dissensions entre les paysans.
Le 21 juin, une opération conjointe de membres des bataillons Cobras
et des vigiles de l’entreprise de sécurité Orión (recrutée par M.
Facussé), menée dans le but d’arrêter deux membres de la coopérative
La Aurora, provoque la mort d’un jeune de 17 ans. L’autopsie révèle
douze impacts de balles (7). Le communiqué du MCA souligne que la
finca La Aurora avait été assignée à la coopérative par l’INA.
Le 17 août, trois membres du MCA (dont un adolescent de 14 ans) sont
assassinés. Quelques jours plus tard, un affrontement a lieu à Zacate
Grande entre les occupants des terres récupérées et les habitants de
villages voisins, à qui M. Facussé a remis des « titres de propriété »
et fait miroiter la construction d’un collège pour leurs enfants.
La liste des intimidations et arrestations arbitraires s’allonge tous
les jours mais les institutions financières internationales ne
sourcillent pas. Dans une lettre (8) adressée le 17 novembre 2010 au
président de la Banque mondiale, M. Robert Zoellick, l’ONG canadienne
Rights Action accuse celle-ci d’être coresponsable des exactions
commises dans l’Aguán. Dénonciation fondée sur le fait que le 5
novembre 2009, Dinant avait reçu de la Corporation financière
internationale (IFC) – chargée de l’attention au secteur privé au sein
de la Banque mondiale – le prêt n° 27.250, à hauteur de 30 millions de
dollars.
Les rumeurs, régulièrement relayées par la presse, faisant état de
l’existence de groupes armés au sein du MCA se sont renforcées ces
derniers jours. Certains médias croyant même savoir que les bases
d’entrainement de la guérilla se trouveraient au Nicaragua (9)… Ironie
du sort : les terres originalement occupées par le MCA, avaient,
elles, bel et bien servi de base pour les troupes de la Contra, dont
l’objectif était précisément d’agresser le Nicaragua voisin…
Le massacre du 15 novembre a donné un nouveau prétexte à l’envoi de
l’armée dans la région. Mais contre toute attente, au lieu de s’en
prendre aux milices armées des entrepreneurs de la palme, ce sont les
bureaux de l’INA – ceux-là même où sont entreposés les dossiers de
régularisation des terres du MCA – qui ont été militarisés.
Le 6 décembre les paysans ont repris les blocages de route pour exiger
que justice soit faite. Le 7 décembre, un communiqué du MUCA avertit
que la communauté Guadalupe Carney est de nouveau encerclée par l’armée.
Le 15 décembre, 600 militaires ont pris position sur les collines
alentours et des hélicoptères survolent la zone.
Note :
(1) Giorgio Trucchi, « Masacre y barbarie en el Bajo Aguán »,
Secrétariat régional latino-américain (Rel-UITA), 16 novembre 2010.
(2) « Ley para la Modernización y Desarrollo del Sector Agrícola
(LMDSA) », Institut agraire national (INA), 5 mars 1992.
(3) Aujourd’hui Front national de résistance populaire (FNRP).
(4) Qui se présente également sous le sigle MUCA (Mouvement uni des
paysans de l’Aguán).
(5) German Reyes, « Incumplimiento del gobierno caldea los animos en
el Aguán », Revistazo, 18 novembre 2010.
(6) « Problema del Aguán destruiría la economía », La Prensa, 25 mai 2010.
(7) Giorgio Trucchi, « Asesinato salvaje de joven del MUCA »,
Rel-UITA, 22 juin 2010.
(8) « Letter to the World Bank », Rights Action, 17 novembre 2010.
(9) « Hondureños estarían entrenándose en Nicaragua para
desestabilizar orden legal y democracia », El Proceso, 24 novembre 2010.
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